L’abdication d’Édouard VIII
Que le lecteur ne s’attende surtout pas à trouver un récit romanesque de l’aventure du roi d’Angleterre qui préféra l’amour à son trône. L’auteur a écrit davantage un ouvrage de sociologie que d’histoire, car il a voulu montrer, en grands détails, comment l’institution royale britannique s’est heurtée au système gouvernemental et social, dans une affaire qui, de toute évidence, dépassait largement la personne du roi, bien que celui-ci fût intimement impliqué dans son développement et son dénouement.
Ce livre est long, sans doute mal équilibré : dans l’analyse globale s’insèrent de nombreuses analyses partielles portant sur les personnalités et les institutions engagées. Le récit manque de souplesse ; parfois, il paraît languir. Aussi bien faut-il, à notre avis, le considérer comme une étude de la société et des mœurs politiques anglaises des années d’avant-guerre. La toute-puissance du Premier ministre [Stanley Baldwin] – dont Brian Inglis fait pourtant un portrait peu flatteur – éclate tout en se heurtant aux traditions et aux convenances. La force de tout ce qui comptait en Angleterre : l’Église, le Parlement, « l’Établissement », s’oppose à la faiblesse d’un roi qui est seul, sans amis influents, malgré sa grande popularité. Le peuple, qui lui avait donné tant de marques d’attachement, reste en dehors du drame dont il n’est pas informé, sinon lorsqu’il est déjà conclu. Contre un tel système, les individus ne peuvent pratiquement rien, même lorsqu’ils ont l’exubérante vitalité d’un Churchill. Les puissances de l’Angleterre n’ont pas chassé Edouard VIII, mais elles ne l’ont pas retenu ; les solutions qui auraient pu être trouvées sur le continent n’étaient pas acceptables dans les îles Britanniques. Et le drame, replacé dans le contexte de l’histoire, ne dépasse guère le volume d’un incident, sans influence sur les destinées de l’Empire. ♦