Crise à la Maison Blanche
Les souvenirs de Robert Kennedy sur la crise de Cuba de 1962 ont été dictés, mais non revus par l’auteur. Les circonstances tragiques qui sont dans toutes les mémoires les rendent doublement émouvantes. Le récit est simple, clair, direct : peut-être, sous cette forme de premier jet, est-il plus frappant que s’il avait été l’objet d’une mise au point attentive. Le lecteur vit dans la fièvre qui s’empara de la Maison-Blanche au moment où furent découverts les préparatifs soviétiques à Cuba ; bien qu’il en sache l’issue, il ne peut manquer de participer à la crainte qui s’emparait alors des hommes d’État américains.
Il est inutile de revenir sur les faits, que ce livre rappelle pourtant opportunément, car ils échappent vite à la mémoire. Mais on ne peut s’empêcher de songer à quel point la paix du monde est fragile, et tient à la seule décision de quelques hommes dont les nerfs pourraient céder. L’histoire nous raconte amplement la façon dont les guerres ont éclaté ; elle est beaucoup plus avare de récits relatant les circonstances dans lesquelles elles ont pu être évitées. C’est ce qui donne à ce livre un intérêt tout particulier, car il démontre que la guerre n’est pas fatale, et que le fameux point de « non-retour » peut être repoussé bien au-delà des limites qui lui sont généralement assignées. Il esquisse une sorte de technique du comportement des responsables en cas de crise, dont l’élément principal est la consultation du plus grand nombre de personnes qu’il est possible à un chef d’État de voir et d’entendre dans des délais obligatoirement courts, une sorte de technique que l’on pourrait dénommer « anti-camerilla » ; les meilleurs conseils peuvent venir de ceux qui ne font pas partie de l’entourage familier de celui qui doit décider, mais appartiennent à tous les milieux et sont capables d’avoir une opinion sur les affaires mondiales. ♦