L’Allemagne en mouvement
Ces pages se lisent d’une traite. L’auteur a de l’élan et du souffle : il entraîne son lecteur à vive allure dans les fourrés difficiles de la politique allemande. Mais il en donne une description bien noire ; on se demande, en refermant l’ouvrage, comment un pays si mal géré, si mal conduit, mené par ses dirigeants d’un échec à l’autre, peut encore être le grand pays que l’on croyait…
Toute thèse nécessite un certain degré d’exagération, voire de caricature ; la méthode est bonne ; au lecteur de remettre les choses au point, s’il le peut, dans ce « bilan contrasté » dressé par Heinz Abosch, qui y reconnaît un solde positif, surtout fait d’une prospérité matérielle assez terne, d’un « système tranquille » et d’une apparence presque idyllique. Mais il est plus à l’aise pour analyser le passif – analyse qui occupe pratiquement la totalité des pages de son ouvrage. L’Allemagne de l’Ouest a payé du lourd tribut de la scission le calme dont elle paraît jouir ; mais elle a dû admettre aussi une fédéralisation de plus en plus grande, opposant à une réalité morcelée une politique extérieure « irréelle » fondée sur le rêve renouvelé d’une Grande Allemagne. Ce reproche s’adresse surtout au Chancelier Adenauer, et dans une mesure moindre, à son successeur, M. Erhard. Dans le domaine de la politique intérieure, la dénazification n’a pas été faite sérieusement, comme l’indique le nombre très faible des sanctions prises contre les anciens nazis. Une armée, a été créée, à grands frais ; « pour quoi faire ? », puisque le danger d’une guerre européenne diminue et puisque les experts estiment que, si la guerre éclatait cependant, cette armée ne tiendrait que quelques jours devant les forces soviétiques.
Il ne semble pas utile de multiplier les exemples puisés dans ce livre, intéressant, vivant, vibrant, mais passionné. ♦