De Lattre au Viet-Nam. Une année de victoires
Un beau livre. Les anciens du Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient (CEFEO) le liront avec plaisir, avec satisfaction, avec émotion. On a tant écrit sur les dessous et les misères de la guerre d’Indochine qu’il était bon que l’on écrivît aussi sur ses fastes, car elle en connut, notamment au cours de cette année 1951, pendant que le général de Lattre de Tassigny commandait en chef. Les victoires défensives de Vinh Yen, du 18 au 17 janvier, de Dong Trieu et Mao Khe, du 20 mars au 4 avril, du Day, du 28 mai au 22 juin, démontrent au Viet-Minh qu’il n’est pas encore de taille à affronter une armée aguerrie, dans des combats de forme classique ; elles arrêtent les tentatives d’invasion du delta qu’il a tentées par le Nord-Ouest vers Hanoï, le Nord vers Haïphong et l’Ouest vers Nam Dinh.
Puis le corps expéditionnaire porte ses coups sur les arrières de l’adversaire, et ce sont les nouvelles victoires de Nghia Lo, en octobre, et de Hoa Binh, en novembre. Entre-temps, de Lattre est allé à Washington, a convaincu les Américains de nous aider en nous fournissant le matériel destiné à équiper la nouvelle armée vietnamienne que le gouvernement de Bao Daï va enfin lever ; il a rendu visite au Pape, et obtenu ainsi l’appui des catholiques vietnamiens. Mais le général est atteint d’une grave maladie, que le deuil de la mort de son fils, tué à Ninh Binh pendant la bataille du Day, a rendu plus grave encore. Revenu en France, il meurt à Paris le 11 janvier 1952, « ayant bien mérité de la Patrie ».
L’auteur a donné à son récit l’allure d’une épopée, beaucoup plus que celle d’une histoire. La matière s’y prêtait largement. Son ouvrage est beaucoup plus un poème à la gloire des combattants et de leur chef qu’un historique minutieux et détaillé de leurs combats ; c’est une sorte de chanson de geste. Mais il est bon qu’il en soit ainsi : l’histoire ne s’en trouve pas trahie ; elle en est magnifiée. Que d’autres racontent les faits avec un plus grand souci d’expliquer techniquement comment et pourquoi ils se déroulèrent, entrent davantage dans le détail du fonctionnement de cette machine de guerre qu’animaient l’esprit et la foi du général de Lattre ! Ce chant à sa mémoire et à celle des hommes qu’il entraîna valait d’être publié. ♦