L’échec américain au Viet-Nam vu par un Américain
La thèse est que les Américains n’ont jamais compris où était leur intérêt au Vietnam, et, après avoir combattu ouvertement ou insidieusement le retour des Français en 1945, puis l’avoir insuffisamment appuyé en 1954 au moment de Dien Bien Phu, se sont fiés à des fantoches à la suite desquels ils se sont lancés dans une aventure qui ne peut se terminer que par un échec. « Une croisade stupide, insensée, contre le colonialisme, qui fut décidée d’un commun accord par Roosevelt et Staline à la conférence de Téhéran [1943], nous enfonça profondément dans le bourbier de l’Indochine. Notre détermination à remplacer les alliés que nous chassions fit le reste ». Il ajoute un peu plus loin : « L’histoire de l’Indochine, c’est l’histoire du déclin de l’Occident ». Ces deux phrases donnent le ton de l’ensemble de l’ouvrage, qui, écrit dans les derniers mois de 1964, ne fait évidemment aucune place aux événements récents de l’engagement de plus en plus formel des troupes et de la diplomatie américaines dans les affaires du Sud-Est asiatique.
Le récit, assez lourd, « épluche » toutes les fautes américaines, dans les petites comme dans les grandes affaires, et ne donne aucune contrepartie, car rien ne trouve grâce aux yeux de l’auteur. C’est donc un réquisitoire, plus monotone que véhément, et tellement sévère que le lecteur se trouve à la longue un peu gêné de le lire sous la plume d’un Américain, quelles que soient les opinions personnelles qu’il puisse avoir sur la question.
On le lira donc en tenant compte du parti pris systématique d’Hillaire du Berrier. On y apprendra beaucoup de choses. On jugera de façon plus informée la façon dont une partie de l’opinion envisage, aux États-Unis, les événements de 1965, ce qui permettra de mieux les comprendre. Pour sortir de l’inévitable échec annoncé par l’auteur, il fallait un redressement aboutissant à une victoire sans ambiguïté. L’histoire dira qui avait raison du gouvernement américain lancé dans l’action ou de l’opposition. ♦