Un printemps arabe
Les événements vont vite. M. Benoist-Méchin a fait un long voyage au Moyen-Orient en fin 1957 et début 1958. Publiant son livre un an après son retour, il énumère, dans une postface, les modifications survenues en douze mois au monde qu’il a décrit. Est-ce à dire que cet ouvrage manque d’actualité, et par suite, pour les lecteurs pressés que nous sommes, d’intérêt ?
Certainement pas. Car ce livre est à la fois un reportage, au sens noble du terme, un récit de voyage, une méditation sur les civilisations dont le Moyen-Orient a été successivement le théâtre, et, dans une certaine mesure, une confession d’un homme à la recherche de Dieu. Tous ces thèmes se mêlent dans un unique ensemble, dont la lecture est captivante. Point n’est besoin d’évoquer le talent bien connu de l’auteur ; dans ce livre, il s’exprime d’une façon plus immédiate et plus tangible encore que dans les nombreux volumes qu’il a déjà publiés et que tout le monde a lus.
M. Benoist-Méchin a visité l’Égypte un an après l’affaire de Suez, l’Arabie saoudite, Koweït, le Liban, la Syrie, la Jordanie et la Turquie. Il s’est entretenu avec des hommes universellement connus : le Colonel Nasser quelques semaines avant la naissance de la République arabe unie, le roi Séoud d’Arabie, le roi d’Irak et Noury Saïd, peu avant qu’ils ne tombent sous les coups des révoltés de Bagdad, le roi de Jordanie, et de nombreux autres personnages intimement liés à l’histoire d’aujourd’hui ou à celle d’hier. Il a fait de multiples pèlerinages aux lieux les plus célèbres, des Pyramides aux réalisations ultra-modernes de l’Aramco, des mosquées les plus anciennes au tombeau du Christ, du canal de Suez au Bosphore. Son témoignage relie l’actualité la plus aiguë aux vestiges les plus nobles et les plus respectables de l’histoire. La rapidité et la puissance de l’évolution des nations arabes l’ont frappé, comme leur jeunesse et leur foi dans l’avenir ; il reconnaît avoir dû modifier bien des idées préconçues, bien des notions qu’il croyait solidement assises en son esprit, devant le spectacle de ce Moyen-Orient où se joue peut-être le sort du monde, et qui reste en tout cas un des pivots de la politique mondiale.
Le lecteur restera libre de son opinion ; l’auteur ne cherche pas à lui en imposer une. Mais il n’est sans doute pas un seul lecteur qui ne doive reconnaître, en refermant le livre, y avoir beaucoup appris. ♦