Géographie de la population. T. I et T. II
La collection « Géographie économique et sociale », publiée sous la direction d’A. Chollet, vient de s’enrichir d’un nouveau volume, second et dernier tome d’un ouvrage dont la première partie avait paru en 1956. C’est la Géographie de la population, dont l’auteur est Mme J. Beaulieu-Garnier. Cet ouvrage considérable, dont le lecteur ne s’étonne pas d’apprendre qu’il a demandé à l’auteur de longues années de travail, apporte, non des théories, mais des faits. C’est là son principal mérite. Il est en effet courant de lire des articles de revue et des livres traitant des problèmes que soulève la surpopulation, phénomène indiscutable et généralisé, mais dont la signification est très différente suivant les lieux et les moments ; la plupart de ces écrits exposent des thèses et présentent des arguments à l’appui de celles-ci. Cette argumentation manque parfois d’objectivité, ou tout au moins, est plus ou moins volontairement déformée.
Dans les livres de Mme Beaulieu-Garnier, le lecteur trouvera de nombreux chiffres, de nombreux tableaux, et leurs commentaires, inspirés par une attitude scientifique, un souci de ne pas aller au-delà de ce qui peut être raisonnablement et objectivement déduit, un scrupule d’équité et de franchise, lorsque plusieurs interprétations sont possibles, qui ne manquent pas de frapper un lecteur, même non spécialiste des questions traitées.
Mais cet ouvrage n’est pas un simple recueil de renseignements statistiques. Il est une présentation ordonnée et logique des phénomènes de population dans le monde : accroissement numérique, vieillissement ou rajeunissement, migrations locales ou intercontinentales, transformations sociales. C’est une peinture du milieu vivant, qui compense et corrige l’aridité des chiffres.
Dans une première partie, sont étudies les données générales de la géographie de la population. Dans les parties suivantes, l’auteur expose les faits relatifs à l’Europe occidentale et méridionale, puis à ses « prolongements », c’est-à-dire l’Amérique du Nord (États-Unis et Canada) ; à l’Australie et à la Nouvelle-Zélande, enfin à l’Amérique latine. C’est sur cette dernière que s’achève le premier tome, consacré pratiquement aux zones habitées par la race blanche.
Dans le second tome, l’auteur aborde l’étude de la population en Afrique, au Moyen-Orient, dans l’Asie des Moussons, et enfin, dans une dernière partie, consacre des pages du plus haut intérêt aux phénomènes propres aux pays socialistes : URSS, Chine, démocraties populaires.
Il est peu probable qu’aucun lecteur lira d’une seule traite cet ouvrage abondant. L’auteur ne semble pas avoir eu d’ailleurs cette intention. Mais, après avoir pris une vue d’ensemble des renseignements si nombreux et si intéressants qu’il pourra y trouver, le lecteur saura qu’il lui est devenu nécessaire, avant de traiter d’une question relative à une région du monde, de relire attentivement le chapitre ou le passage qui lui est consacré dans l’un ou l’autre des deux tomes. Aucun fait, économique, politique, militaire, ne peut plus en effet être envisagé sans que ses rapports avec le « facteur population » n’aient été précisés.
Il faut remercier Mme Beaulieu-Garnier d’avoir réuni une documentation aussi claire, aussi complète, aussi précise, aussi objective, sur une question si capitale. On ne peut que souscrire – et réfléchir longuement – à ces phrases que nous relevons dans la conclusion de l’ouvrage : « Dans une humanité qui dépasserait cinq milliards d’individus vers l’an 2000, la Chine représenterait plus de 30 % du total, l’Europe, sans l’URSS, à peine 10 %, La clef de l’évolution du monde d’aujourd’hui comme de demain pourrait bien se trouver dans ces chiffres. » ♦