Joukov
Dans le clair-obscur qui entoure gens et choses de Russie ce livre éclaire un peu – pour le grand public – cette figure du Maréchal Joukov dont le rôle n’est sans doute pas terminé.
Éclairage assez incertain d’ailleurs.
La première partie du livre, la plus volumineuse, montre la carrière de Joukov jusqu’en 1940, étude quelque peu romancée, mais qui relate des épisodes peu connus ; un premier séjour en Mongolie, un voyage d’études en Allemagne.
Une chronologie peu précise, des faits, font que l’image de Joukov en 1940 reste assez incertaine.
Fils de Koulak [terme péjoratif désignant un fermier possédant de la terre, du bétail, des outils et faisant travailler des ouvriers agricoles salariés], ayant reçu une instruction à peu près régulière, gros travailleur, il domine certainement dans le corps des officiers supérieurs le tout-venant issu de la Révolution et se fait le protagoniste de l’emploi des chars, dont il commande les premières unités.
Pourtant, il ne reste pas, comme son maître le Maréchal Chapochnikov, un sans-parti, communiste bon teint, il est des plus dévoués personnellement à Staline. Bon travail qui a fait de lui, en 1936, un général de 40 ans. Et il lui donne une preuve de fidélité qui, par ailleurs, laisse un doute sur sa droiture : au moment où s’amorça la grande purge, au début de 1937, sans hésiter il fait suivre à Staline une lettre d’un de ses camarades s’indignant de ce que des agents provocateurs à la solde de Staline montaient un complot pour perdre Toukhatcbevski et le haut commandement… Quatre mois après Toukhatchevski était fusillé, et Joukov partait, fin 1938, commander en Mongolie les troupes rouges qui allaient refouler les Japonais sortis de Mandchourie : en vainqueur il rentrait à Moscou.
Et puis, c’est la guerre de 1939-1945.
Pour cette période l’exposé de M. Jansky prend l’aspect d’un manuel d’histoire élémentaire qui n’est plus centré sur Joukov. Cependant l’auteur prête à ce dernier une influence prépondérante dans la contre-attaque de 1941 devant Moscou et dans celle de 1943 devant Stalingrad.
Et apparaissent alors les précautions de Staline pour rejeter dans le rang les chefs que leur commandement a rendu populaire. Et Joukov, après avoir joui du triomphe de la prise de Berlin, va connaître trois ans de résidence surveillée à Orenbourg (à 1 232 km au sud-est de Moscou).
Tout de même, en 1949, il remonte en selle comme adjoint de Boulganine au ministère de la Défense nationale.
Puis c’est la mort de Staline en 1953.
Alors, par suite de véritables coups d’État militaires, dont Joukov est le pivot, c’est l’élimination des purs staliniens : Beria exécuté, Malenkov remis dans le rang…
Et Joukov « filleul de Staline », sort de là plus solide que jamais…
Pour quoi faire ? L’avenir le dira. ♦