L’Allemagne entre l’Ouest et l’Est
Tout ce que publie l’ancien président du sénat de Danzig, Hermann Rauschning, attire aussitôt l’attention. On a pu lire en français, Hitler m’a dit et la Révolution du Nihilisme ; on ne lira pas avec moins d’intérêt la traduction de l’ouvrage que Rauschning a composé depuis la fin de la guerre : L’Allemagne entre l’Ouest et l’Est. Ce titre, il a soin de le souligner, ne veut pas dire que l’Allemagne hésite entre l’Ouest et l’Est, il signifie que, nation centrale, elle est faite pour établir la liaison entre l’Ouest et l’Est.
À ce titre, ce n’est pas en s’armant qu’elle pourra jouer le rôle que la géographie lui attribue, mais en s’unissant spirituellement à la nouvelle mission culturelle qu’il est du devoir de l’Europe de réaliser. Rauschning rejette le marxisme de l’Est mais aussi l’ordre bourgeois libéral de l’Ouest. Il veut un mouvement révolutionnaire à la fois progressiste et conservateur, fondé véritablement sur une loi morale. Il reconnaît la culpabilité allemande dans la dernière guerre mais il tient pour contraire au droit la procédure du procès de Nuremberg. La situation présente, qui a brisé l’Allemagne depuis des années, l’empêche de renaître moralement. Plus attirée vers l’Ouest que vers l’Est, mais risquant de devenir le champ de bataille des peuples en conflit, elle peut être tentée, pour sa sécurité de s’entendre avec l’URSS ; elle idéaliserait alors le communisme, ce qui serait une menace pour le monde entier. Tels sont, parmi beaucoup d’observations de détails, quelques aperçus d’ensemble qui se dégagent d’un ouvrage dont on peut discuter la tendance, mais que l’on trouve toujours très attachant. ♦