Guerre en Corée
La chose la plus extraordinaire de ce livre, c’est que c’est une femme qui l’ait écrit, après l’avoir vécu. Dans cette guerre, une des plus dures que les correspondants de guerre aient eue à suivre, il est admirable que cette femme ait bien souvent pu faire encore mieux que ses compagnons hommes qui pourtant se sont couverts de gloire. Et si son livre est si vivant, c’est que, malgré les dangers et les difficultés, elle a passé la plus grande partie de son temps, parmi les combattants de première ligne, malgré leurs souffrances et leur vie dure et pénible, dans des conditions parfois épouvantables qu’elle décrit avec simplicité. Pour cela elle a dû lutter aussi contre un commandement qui – non sans raison, avouons-le – ne voulait pas entendre parler d’une femme comme correspondant de guerre. Il est vrai que Marguerite Higgins – Française par sa mère – peut être considérée comme une exception. De sa conduite héroïque nous devons maintenant nous réjouir : car elle a ramené de Corée un récit, aussi sobre que précis, de cette campagne et des vues perspicaces sur les forces et les faiblesses de l’armée américaine.
Ses opinions militaires manquent – et cela est bien naturel – quelquefois de technicité ; mais elles sont souvent pleines de bon sens, toujours intelligentes. Marguerite Higgins regrette, par exemple, la médiocre formation morale et militaire des GI. Elle soutient que « la meilleure réponse à opposer à des chars est une concentration plus nombreuse et de meilleure qualité de chars américains. » Elle désire aussi des troupes plus légères. Mais, fantassin de première ligne, elle paraît souvent minimiser le rôle de l’aviation. On regrette qu’elle n’ait pas fait un court séjour dans les unités de l’USAF. Chez l’ennemi nord-coréen, elle admire surtout la valeur des officiers et les remarquables capacités de la troupe à s’infiltrer. Certains récits de combat sont particulièrement vivants. Ce sont, par exemple, ceux de la marche du colonel Michaelis, actuellement à l’état-major du général Eisenhower, sur Muson et l’héroïque défense des fusiliers marins autour des réservoirs de Chang-Jiu, combats qu’elle a héroïquement vécus avec eux.
Dans les dernières pages, écoutons cette magnifique leçon à ses compatriotes, dont nous pouvons faire aussi notre profit : « Ce que l’Amérique doit avant tout produire en quantité industrielle, c’est du courage. » En résumé, livre instructif que l’on lira comme un roman, avec toujours dans la pensée que c’est une femme magnifiquement courageuse et énergique qui l’a écrit.