Les fusilliers-marins en Indochine
Le commandant Kilian retrace, dans ce livre, l’histoire des multiples activités de la « Brigade marine » du corps expéditionnaire d’Extrême-Orient, depuis l’arrivée de ses premiers éléments à Saïgon (octobre 1945) jusqu’à sa dissolution au début de 1947, période pendant laquelle il en a exercé le commandement.
Le dégagement des abords de Saïgon terminé, le commandement reconnut vite que, « dans cette véritable éponge qu’est le delta du Mékong », on progresse plus facilement par eau que par terre et que le meilleur moyen d’étendre rapidement son œuvre de pacification au reste de la Cochinchine était d’utiliser le plus possible les bras et les canaux innombrables de cet immense delta où les routes terrestres traversant de vastes rizières au sol boueux, peuvent être trop facilement coupées. Cet état de choses ouvrait à nos marins un champ d’action où leurs aptitudes particulières allaient trouver le meilleur emploi. Effectivement, au cours de l’année 1946, la « Brigade marine » se transforma graduellement en une force amphibie comprenant deux flottilles fluviales opérant, l’une, en Cochinchine, dans le delta du Mékong, l’autre, au Tonkin, dans celui du Fleuve Rouge. Pour constituer ces flottilles on utilisa tous les facteurs imaginables : chaloupes, bacs, chalands automoteurs, jonques à moteur de construction japonaise, et surtout landing-crafts anglais et américains, de types divers, achetés aux Philippines et aux Indes.
L’auteur décrit la part brillante prise par ces flottilles et leurs commandos à toutes les opérations du corps expéditionnaire. En Cochinchine, d’octobre à mars 1946, nos fusiliers-marins enlèvent par surprise Mytho, Vinh Long, Canthô, puis combattent autour de Bien-Hoa. Au Tonkin, de mars à février 1947, ils sont au premier rang lors du tragique débarquement à Haïphong et, après le guet-apens de Hanoï (décembre 1946), ils jouent un rôle décisif dans le rétablissement des communications (entre Hanoï et Haïphong), puis dans la libération de Mans Dunh (janvier 1947). Ce récit des exploits des « Marins en kaki » nous est présenté en un style dépouillé, très vivant, souvent émouvant. Le commandant Kilian a pleinement atteint le but qu’il se proposait en l’écrivant : préserver de l’oubli la mémoire de tous ses camarades « tombés en Indochine pour que la France y reste présente » et rendre aux vivants l’hommage que méritent les efforts, les souffrances et les sacrifices endurés au cours d’une campagne particulièrement dure et ingrate.