L’Allemagne souterraine
Allen W. Dulles fut le chef du service secret américain à Berne de février 1942 à octobre 1945. Il dirigea un réseau d’information politique qui s’étendait sur presque toute l’Europe. Son livre nous dit les conspirations qui ont été organisées contre le régime nazi. Le simple exposé des intrigues dont W. Dulles eut connaissance est singulièrement vivant et dramatique.
Le récit part du 22 juillet 1944, date de l’exécution et de l’échec du complot préparé par l’Armée. Hitler, à son grand quartier général, ne fut que blessé. La plupart des conjurés furent découverts et exécutés. Cet attentat était le résultat de conjurations qui se formaient depuis longtemps. Il y eut toujours dans l’armée des opposants au régime de Hitler. Dès l’affaire des Sudètes, si les Alliés étaient intervenus, des généraux allemands étaient prêts à trahir le Führer. Lorsque la guerre eut éclaté, beaucoup d’entre eux se rendaient compte que la défaite allemande était certaine ; ils ne cessaient de chercher un moyen d’arrêter la lutte. Les Alliés le savaient. Ils n’ont pas tenu compte de ces intrigues. Paix sans conditions, telle aurait été la réponse aux demandes d’armistice des chefs de l’Armée allemande. Les conjurés appartenaient plutôt aux partis de la droite. Ils avaient des ramifications vers la gauche, mais à l’exclusion des communistes, par crainte du bolchevisme. Ils comptaient sur une rupture des Alliés avec la Russie et penchaient plutôt pour un régime occidental. L’Église servit souvent de point d’appui ; il y eut des personnalités courageuses dans le clergé protestant et le clergé catholique. On en chercherait vainement dans l’Université ; elle resta passive ou fut ostensiblement dévouée au nazisme. L’auteur nous met en garde, dans sa conclusion, contre une interprétation trop optimiste de ces complots. Il ne faudrait pas qu’ils nous amènent à conclure qu’il y eut beaucoup d’antinazisme en Allemagne ; les conjurés restaient eux-mêmes très attachés au national-socialisme. A.W. Dulles espère toutefois que certains esprits sauraient aujourd’hui conduire l’Allemagne vers la démocratie.