Journal 1913-1914
Quand on sort de la lecture passionnante du livre passionné que constitue le 3e tome des mémoires de Joseph Caillaux, on trouve, dans le journal de Maurice Paléologue, une réponse à bien des accusations qu’il contient. Ce sont, prises au jour le jour, alors que s’amassait la tourmente de la première guerre mondiale, les notes d’un spectateur particulièrement bien placé, puisqu’il occupait le poste difficile de directeur politique du ministère des Affaires étrangères, avant de représenter la France en Russie. Il s’en faut de beaucoup que des hommes, comme ceux qui, dans les deux années qui précédèrent la catastrophe, eurent la lourde charge de la politique intérieure et extérieure française, aient été aussi égarés et, pour tout dire, « bellicistes » que les a figurés son adversaire Caillaux.
Les notations qu’il trace de l’activité d’un Poincaré nous le montre, au contraire, prudent, épris de paix, se méfiant des pressions que pouvait chercher à exercer sur lui un ambassadeur dangereux comme Isvolsky. Il faut lire ces pages savoureuses, inspirées à un esprit profondément cultivé et humain, remarquablement informé de tous les détours et pièges de la politique européenne par un réseau incomparable de relations et d’amitiés personnelles.