Grâce à des documents inédits (notamment des correspondances privées), l'auteur revient sur le sort des prisonniers de guerre français et anglaise au XVIIIe siècle : leurs conditions de vie, les échanges et leur libération, les règles de courteoisie…
Prisonniers de guerre français et anglais au XVIIIe siècle
Jamais le sort des prisonniers de guerre n’a été enviable, mais il est des époques et des pays où leur dure condition s’est trouvée singulièrement adoucie par l’humanité et la courtoisie des vainqueurs, par l’octroi de certaines faveurs et surtout par une prompte libération.
On peut dire que les prisonniers de guerre ont toujours été bien traités en France. Au XVIIIe siècle, certains lieux de détention n’étaient nullement désagréables, et les officiers anglais nouaient d’amicales relations avec les militaires et même parmi la population civile, qui leur prodiguait les égards et les prévenances.
Quant aux soldats, ils n’avaient pas trop à se plaindre, si l’on en juge par les renseignements puisés aux archives notariales concernant les prisonniers de guerre anglais détenus à Saint-Malo et à Dinan au XVIIIe siècle. Tous les jours, les prisonniers recevaient une ration de pain d’une livre et demie (728 grammes), « bien boulangé et cuit à point » une, livre de « bonne viande fraîche, vache grasse ou mouton avec une petite quantité de veau comprise dans le poids ». Avec le bouillon on faisait un potage agrémenté de choux, d’herbes et de navets, mais les prisonniers étaient tenus de distraire de leur ration de pain la quantité voulue pour le trempage de cette soupe. Aux jours maigres et aux vigiles, on leur donnait des pois, des fèves des fayots cuits au beurre fondu et relevés de vinaigre. La boisson ordinaire était de l’eau, mais très pure. À ceux qui se signalaient par leur bonne conduite, on distribuait une pinte (95 centilitres) de bon cidre ou de bière. Le couchage était de paille que l’on renouvelait tous les huit jours ou de paillasses dont on changeait la paille chaque quinzaine. Les malades étaient soignés à l’hôpital et bénéficiaient d’un régime spécial de lait, d’œufs, de légumes et d’eau-de-vie sucrée. L’entrepreneur chargé de leur nourriture recevait, par journée de prisonnier, 4 sols 9 deniers (soit 25 centimes d’avant 1914) et 9 sols (45 centimes) pour ceux qui se trouvaient à l’hôpital, en raison des frais médicaux et pharmaceutiques. Les prisonniers avaient à leur disposition des perruquiers, des fraters, comme on les appelait alors, et ils pouvaient se livrer facilement à tous les soins de propreté qu’ils désiraient. Outre l’interprète indispensable, il y avait un aumônier pour les Irlandais catholiques et un chirurgien qui visitait les prisonniers tous les jours.
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