La haute mer, l’espace exo-atmosphérique et le cyberespace constituent des espaces communs de plus en plus convoités par les puissances émergentes. Il y a une volonté de militarisation et donc de contrôle au détriment d’un libre usage. Une prise de conscience des Européens devient urgente s’ils ne veulent pas se voir marginaliser demain.
Vers une nouvelle lutte pour la domination des espaces communs ?
A New Struggle for Domination of Common Space?
The high seas, exo-atmospheric space and cyber space are common spaces that are increasingly coveted by emerging powers. There exists a desire to militarise these spaces and therefore to control them to the detriment of free use. Europeans need urgently to take note of this if they are not to see themselves marginalised in the future.
À l’heure où la défense des frontières est redevenue une préoccupation majeure des États, c’est paradoxalement la maîtrise des espaces « communs » qui constitue plus que jamais la clé ultime de la puissance et de la richesse. En tout premier lieu, il s’agit historiquement de l’espace maritime, compris en tant que « haute mer » avec les espaces aériens qui la surplombent. Mais aujourd’hui, ce principe s’applique aussi aux deux autres espaces nés au XXe siècle grâce à la technologie : l’espace exo-atmosphérique et le cyberespace. Ces trois espaces font aujourd’hui l’objet d’une nouvelle compétition pour leur appropriation à laquelle les Européens seraient avisés de participer faute de quoi ils risquent fort d’être écartés de la course à la puissance et à la richesse du siècle à venir.
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Depuis la Grèce antique jusqu’à l’Amérique du XXIe siècle, la maîtrise des espaces communs a été considérée comme une condition sine qua non de la puissance stratégique. C’est au XIXe siècle que l’amiral historien-géographe américain Alfred Mahan a théorisé ce lien essentiel dans son ouvrage de référence Influence de la puissance maritime dans l’histoire en l’appliquant au seul espace commun connu et utilisé à l’époque, la mer. Si Alfred Mahan avait vécu au XXIe siècle, il n’aurait sans doute pas eu beaucoup de mal à étendre ses principes aux deux espaces communs nés plus récemment grâce à la technologie : l’espace exo-atmosphérique et le cyber-espace dont certaines caractéristiques sont identiques à celles de l’espace maritime. Au terme d’une période de « latence » qui a suivi la fin de la guerre froide et l’effondrement de l’URSS pendant laquelle ces espaces communs ont été considérés comme des espaces de liberté, tout porte à croire que s’ouvre pour plusieurs années une nouvelle compétition pour leur contrôle et leur domination. De son issue dépendra probablement le leadership mondial.
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