Il y a eu, au milieu d’octobre, dix ans que le président Anouar as Sadat est devenu le chef de l’État égyptien. Mais, à cause de la relève présidentielle aux États-Unis, c’est seulement en janvier 1981 que va commencer, en présence de problèmes renouvelés, une autre phase de la politique égyptienne. Le moment est donc venu de proposer une vue globale de la première décennie, 1970-1980, du président Anouar as Sadat. L'auteur, qui durant cette période a visité trois fois l’Égypte dont il était déjà de longue date un familier, tente de synthétiser ici, brièvement, la politique d’un homme d’État que certains gestes éclatants ont rendu illustre, mais dont l’action patiente, réfléchie et continue, a sans doute moins attiré l’attention.
Anouar el-Sadate et l'Égypte (1970-1980)
L’élection de M. Anouar as Sadat, le 15 octobre 1970, à la présidence de la République égyptienne, ne constituait pas une véritable surprise. Entre tous les compagnons de Gamal Abdel Nasser, il s’était distingué par une fidélité totale, par la constance et par la discrétion. D’aucuns, parmi les observateurs de l’extérieur, concluaient qu’il n’était apte qu’à des fonctions de deuxième rang ; et, lorsque Gamal Abdel Nasser prévoyait que, dans l’éventualité de sa propre disparition, le colonel Sadat exercerait l’intérim du pouvoir, cela permettait en effet diverses interprétations.
Le raïs avait peut-être pensé que l’absence d’ambition dont témoignait son second le désignait pour présider impartialement à l’élection de son successeur définitif. Mais peut-être aussi avait-il songé, de la sorte, à orienter le choix des représentants du peuple égyptien. Et, compte tenu du peu d’initiative dont les membres du Parlement faisaient habituellement preuve, cette deuxième hypothèse devait apparaître comme la plus probable.
Beaucoup d’appréciations malveillantes ont été alors portées sur M. Anouar as Sadat, en particulier par la presse anglo-saxonne : des doutes formels furent exprimés quant à sa capacité de conduire un État. L’opinion britannique était influencée par des souvenirs vieux d’une trentaine d’années ; elle se rappelait que le lieutenant Sadat, durant la deuxième guerre mondiale, avait collaboré avec les services de l’Axe ; elle lui imputait d’avoir, par la suite, rejoint l’Association des Frères Musulmans.
Il reste 94 % de l'article à lire
Plan de l'article