L’Europe est à la fois unité et diversité, homogénéité par son histoire et complexité par sa géographie. Sa défense n’en est que plus difficile à assurer, surtout si l’on raisonne sur les principes actuels ayant délégué la sécurité à l’Otan. Il faut désormais penser différemment et proposer un projet novateur.
La marche en crabe de la défense européenne
The Sideways Movement of European Defence
Europe is both united and diverse: homogeneous by dint of its history and complex through its geography. All of which makes its defence difficult to ensure, the more so if arguments are based on current principles, which delegate security to NATO. As of now, we need to think differently and propose a new project.
La défense européenne, c’est le projet que la France a promu activement sous le nom d’Europe de la défense depuis vingt-cinq ans. Voyons ce qu’elle n’est pas devenue : l’outil intégré de défense des États-membres de l’UE ; une machinerie fonctionnelle gérant l’articulation entre l’Otan et l’UE ; un catalogue de programmes industriels ou d’arsenaux aux financements partagés ; une recherche technologique unifiée déléguée à des opérateurs multinationaux… Ni boîte à outils militaires, ni instrument économique donc ; ni cadre juridique non plus, puisqu’en Europe la défense relève de l’Alliance atlantique depuis 1949 et c’est l’Otan qui l’assume. Quant à l’UE, si le Traité de Lisbonne l’a dotée en 2009 d’une clause de « défense mutuelle » (§42-7) qui dit que, « en cas d’agression armée sur le territoire d’un État-membre, les autres États-membres lui devront aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir », celle-ci n’affecte ni le statut de neutralité de certains, ni les engagements souscrits dans le cadre de l’Otan « qui reste, pour les États qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre ». Ce n’est enfin bien sûr pas non plus une capacité de conduire les guerres interétatiques d’hier, attendu que celles-ci sont désormais illégales (la charte de l’ONU les proscrit) et ingagnables (la dissuasion nucléaire y veille).
La défense européenne, c’est donc bien autre chose, plus immatérielle, plus novatrice. Ce projet veut traduire la souveraineté collective des Européens et la protection de leurs intérêts. Parler de la défense européenne, c’est donc partir de l’histoire du continent européen, l’un des cœurs de civilisation de la planète, rappeler l’histoire complexe de sa stabilisation, évaluer le niveau d’intégration actuel des intérêts de sécurité des Européens et leur capacité à se faire respecter par leurs challengers. C’est ensuite constater l’incapacité de l’UE à déployer une défense européenne crédible. C’est enfin esquisser les conditions à réunir pour la constituer et évoquer les formes qu’elle pourrait prendre (1).
Vaste programme et vieille affaire, aurait dit le Général.
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