Editorial
Éditorial
En cette rentrée 2020, jamais l’insouciance estivale si habituelle aux vacances d’été n’aura été aussi assombrie par la crise consécutive à la pandémie de la Covid-19 et à la fracturation géopolitique de notre monde. D’une part, et avant même les affres de la maladie, le retour à un âge de fer et de feu marqué par les rapports de force, la politique du fait accompli et la critique systématique des enceintes internationales – même si elles ont plein de défauts – sont devenus les nouvelles normes. D’autre part, la rivalité États-Unis versus Chine, à quelques mois d’une élection présidentielle décisive, la remise en cause par Pékin de la légitimité des principes démocratiques tels que pratiqués en Europe notamment, le pan-ottomanisme assumé vulgairement par la Turquie… Autant de sources de crises potentielles majeures, alors même que le coronavirus a démontré l’extrême fragilité de notre modèle de développement économique ayant effacé depuis longtemps la notion de souveraineté au profit du bénéfice financier immédiat.
Les leçons sont amères et remettent en cause nos certitudes et le fonctionnement de l’État, des collectivités, des entreprises, mais aussi de nos habitudes individuelles où le collectif n’est plus de mise : d’abord mes droits et pour le reste, on verra ! C’est le paradoxe du dossier proposé sur la résilience, abordé non pas sous un angle visant à encenser les uns ou les autres, mais à mettre en évidence des enjeux mal perçus, qui se sont cependant révélés structurants, en particulier lors du confinement, pour éviter le pire. Que se serait-il passé si la distribution d’eau, d’électricité ou de nourriture s’était effondrée. Cela signifie qu’il faut, d’ores et déjà, en tirer des leçons et surtout les mettre en œuvre, car, d’un côté, la crise sanitaire de la Covid-19 reste présente et que de l’autre, d’autres crises encore plus dramatiques sont susceptibles de se déclencher dans notre environnement proche.
Alors que chacun aspire à retrouver une vie normale « comme avant », mais aussi « différemment », le besoin de sécurité reste plus que jamais d’actualité. Or, trop souvent, les Gaulois que nous sommes – dans la diversité et la revendication permanente, voulant tout et son contraire – sommes obnubilés par nous-mêmes, oubliant de regarder au-delà de notre environnement immédiat. À l’heure où les conséquences économiques de la pandémie pourraient aboutir à « lever le pied » en termes de défense, il faut être réaliste et regarder l’accumulation des menaces avec des dérapages possibles, d’autant plus que les États-Unis, qui ont renoncé à leur rôle de « gendarmes du monde », sont engagés dans une dernière ligne droite avant le scrutin du 3 novembre, laissant ainsi la porte ouverte à toutes les provocations possibles de pays compétiteurs et en rivalité géostratégique. C’est pourquoi il importe d’être capable de répondre sans délais aux défis actuels dont la pandémie, mais aussi de mieux se préparer pour affronter demain.
Il y a 150 ans, la défaite surprise de l’Empire de Napoléon III amena la proclamation de la République, mais aussi instilla le ferment sournois amenant au naufrage de l’Europe des monarchies en 1914, en raison des rivalités impériales. Il y a 80 ans, la France connaissait la débâcle, la honte et la souffrance pour avoir eu trop confiance en elle-même. Le général de Gaulle, par son Appel, releva notre pays en ayant toujours le souci de préserver son indépendance et sa souveraineté. Aujourd’hui encore, la question reste d’actualité. ♦