À l’initiative de son président, le Dr Schlumberger, l’association nationale des auditeurs de l’IHEDN a organisé, le 24 avril 1982 à l’École militaire, un colloque sur le thème « Urbanisation et défense de l’Europe ». L’association avait centré le débat sur trois questions : urbanisation et bataille, protection des populations par évacuation, défense et urbanisme (respectivement présentés par le colonel Chaix, le général Marchand et M. Portefaix ; le préfet Bignebat a également témoigné). Ainsi le colloque, sans prétendre cerner toutes les conséquences du développement croissant de l’urbanisation, a ouvert la discussion sur un sujet fort riche, où les ambiguïtés prêtent à controverses.
Parmi les colloques - Urbanisation et défense de l'Europe
À l’initiative de son président, le Docteur Schlumberger, l’association nationale des auditeurs de l’IHEDN organisait, le 24 avril à l’École Militaire, un colloque sur le thème « Urbanisation et défense de l’Europe ». L’association avait centré le débat sur trois questions : urbanisation et bataille, protection des populations par évacuation, défense et urbanisme (1). Ainsi le colloque, sans prétendre cerner toutes les conséquences du développement croissant de l’urbanisation, a ouvert la discussion sur un sujet fort riche, où les ambiguïtés prêtent à controverses.
Toute réflexion concrète sur la défense européenne doit, sous peine de disqualification, se situer dans l’irritante dialectique dissuasion-emploi, bataille imaginée-bataille vraie. Comme la bombe à neutrons, comme la stratégie nucléaire hors-sanctuaire, thèmes d’autres colloques dont il a été rendu compte ici (2), la protection civile ou la bataille en zone urbanisée fournissent aux puristes l’occasion d’affirmer que toute évocation d’une situation de guerre va à l’encontre d’une stratégie dissuasive. On sait que les généraux soviétiques n’ont pas de ces pudeurs-là, mais on jugera en Occident qu’il faut accepter le dilemme pour ce qu’il est : les études stratégiques doivent être menées, techniquement, « comme si de rien n’était », mais avec un arrière-plan philosophique et semi-conscient fait de l’horreur et de l’absurdité sur lesquelles repose la dissuasion et que dévoile précisément l’examen concret des problèmes qui se poseraient si, par malheur…
La ville — ou mieux la zone urbanisée — fait au champ de bataille européen une trame d’ambiguïté : est-elle obstacle où le défenseur s’accrochera, alors que l’agresseur mécanisé, désireux de ne pas s’attarder, le contournera ? Gêne pour l’offensive-éclair, n’en est-elle pas pourtant l’objectif majeur, clé que le militaire livre au politique et qui concrétise et permet la mainmise sur le pays conquis ? Vaines questions, rendues dérisoires par l’extension même des zones denses et la coïncidence des villes et des nœuds de communications. Qu’on le veuille ou non, la bataille passe par les villes, et sans doute l’essentiel s’y jouerait-il. Le défenseur y trouvera toujours bénéfice, non selon les images anciennes de combats de rue et de nettoyage d’immeubles, mais par la manœuvre mécanisée dans les cités ouvertes, à la périphérie des noyaux pétrés et par les coups d’arrêt aux lisières, où l’emploi de l’arme à neutrons s’imagine mieux qu’ailleurs. De l’inéluctabilité du combat dans l’habitat et des facilités qu’il offre à la défense (cette forme forte de la bataille clausewitzienne), il faut tirer les conséquences. Pour les structures et l’équipement des forces : armes anti-chars tirant en milieu clos, blindés sommaires du type chasseurs de chars, effectifs suffisants d’une infanterie adaptée. Pour la stratégie, la « manœuvre dissuasive » de défense mobile, imposée par des considérations psycho-politiques, s’accommode bien des terrains semi-urbains de nos marches orientales. Pour l’instruction et l’entraînement enfin, si l’on comprend que la manœuvre « en terrain libre » soit, dans les agglomérations, difficilement praticable (le mètre de trottoir coûte cher), les exercices de PC et de transmissions, qui sont monnaie courante, peuvent s’y dérouler sans grand dommage.
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