Marine nationale - Intramar et les « cyber marins »
Introduction
L’intranet (1) de la marine est né en 1998, quand les premiers services web et de messagerie ont été mis à la disposition des marins dont l’ordinateur pouvait être connecté aux réseaux locaux de la Marine nationale (RLM). Baptisé Intramar, par contraction, il a vocation à être étendu à toutes les formations et organismes et, parmi eux, à tout le personnel de la marine, militaire ou civil, embarqué ou affecté à terre, susceptible d’en avoir l’usage dans ses fonctions. Depuis 2001, l’Intramar permet aux « cyber marins » de naviguer sur les intranets des organismes de la défense connectés au réseau Intradef, l’intranet fédérateur du ministère.
Nombreux sont les « intranautes » qui depuis quatre ans font évoluer leur méthode de travail pour profiter pleinement des capacités nouvelles progressivement offertes par les différentes applications et sites d’informations mis en ligne.
Quelle est aujourd’hui la topologie de l’Intramar ? Quels seront les services nouvellement mis à la disposition des intranautes de la marine à partir de 2003 ? Quels sont les objectifs ultérieurs ? Nous verrons à travers ce cheminement combien la dynamique d’évolution est puissante.
Topologie de l’Intramar en septembre 2002
Décrire un intranet n’est pas chose facile. Il peut être tentant de s’en remettre aux statistiques données automatiquement par les machines. Nous essaierons de dépasser ce simple point de vue, qui est indicatif mais réducteur. Nous devons également déceler les étapes de la croissance de l’intranet et pouvoir distinguer la période de découverte, la phase d’appropriation de l’outil par les marins puis, ultérieurement, la transition du média de partage d’informations au média créateur de valeur ajoutée.
Aujourd’hui plus de vingt mille marins ont accès à Intramar. Ils sont près de huit mille à avoir l’accès direct, car leur poste de travail informatique est relié aux réseaux locaux de la marine. Les autres accèdent via des postes informatiques banals convertis en guichet d’accès Intramar. Dans ce cas comme dans l’autre les marins peuvent disposer d’une boîte aux lettres de messagerie.
Pour le marin, Intramar est avant tout un portail, ou page d’accueil interactive, qui permet à l’intranaute de choisir puis de se connecter facilement à différentes applications ou sites d’informations qui sont mis en ligne sur le réseau de la marine.
Environ 70 sites d’informations sont actuellement accessibles. De nombreuses unités et services ont déjà franchi le pas et ont pris leur place dans ce nouveau média. La direction du personnel et la cellule condition de vie de l’état-major de la marine ont très tôt rendu leurs différents sites ou forum de discussion accessibles au plus grand nombre via l’Intramar. Les forums de discussion sont très appréciés, pas moins de 3 000 messages y sont postés chaque mois.
L’intranaute peut aussi choisir d’accéder aux portails des autres organismes du ministère de la Défense par la passerelle Intradef. Cette dynamique est bien lancée. Ainsi en mai 2002, les échanges entre la Marine et la DGA occupaient-ils les premières places du classement des échanges interorganismes via l’Intradef.
Intramar c’est aussi une messagerie électronique et un agenda en ligne qui peut être rendu consultable par tout intranaute ayant accès à l’Intradef. La messagerie d’Intramar est un moyen rapide pour des échanges officieux. Peuvent y circuler les informations dont la sensibilité relève du domaine de la discrétion professionnelle, c’est-à-dire au plus diffusion restreinte. 350 000 messages électroniques (méls) sont échangés chaque mois.
De nombreux groupes fonctionnels sont créés. Ces espaces virtuels sont des lieux de mise en commun d’information. Ils sont construits au profit de groupes de travail et permettent de travailler simultanément ou à tour de rôle sur les documents d’un projet.
L’Intramar a un périmètre géographique très étendu. En mer, de plus en plus de marins peuvent procéder à la consultation de leur méls et accéder à divers services, dès lors que leur bâtiment dispose des capacités de communication satellitaire suffisantes. Certains marins de Nouvelle-Calédonie bénéficient d’une expérience pilote et ont accès à l’Intramar, disposant ainsi de leur propre boîte aux lettres. Les abonnés mobiles ne sont pas oubliés. Ainsi, une expérimentation est en cours afin de permettre au personnel en déplacement en France de disposer d’une capacité de connexion via le réseau téléphonique. Ils pourront sur simple appel envoyer ou recevoir des méls, consulter leur agenda, partager ou envoyer des documents ou un compte rendu à leur bureau.
Nouveaux services disponibles en 2003
Le schéma directeur de développement de l’Intramar est ambitieux. Les avancées techniques et organisationnelles visent à renforcer encore la confiance des utilisateurs dans cet outil. Ceci passe par la consolidation technique des architectures qui supportent les échanges, par l’augmentation du nombre des postes raccordés aux RLM, par la mise en place de meilleurs débits au profit des bâtiments à quai et en mer.
Les priorités de l’année sont de rechercher un gain pour les bâtiments et un gain pour les abonnés mobiles.
Parallèlement, il faut organiser et faciliter l’émergence de nouveaux sites. Le volume croissant des informations et applications mises en lignes requiert un pilotage de plus en plus complexe. Il faut veiller à entretenir la cohérence indispensable au bon fonctionnement de l’ensemble et veiller au respect des chartes graphiques, politique de sécurité, format d’annuaire requis pour l’interconnexion avec les organismes du ministère via l’Intradef.
La marine expérimente cette année une infrastructure de gestion de clé (IGC). C’est-à-dire qu’elle évalue les conditions de déploiement de nouvelles fonctionnalités comme la signature électronique des méls ou leur chiffrement. Cette démarche s’inscrit dans la démarche générale de l’IGC du ministère.
Le portail de l’Intramar connaîtra aussi cette année divers changements de forme et de fond. La possibilité de le rendre partiellement paramétrable est étudiée. Ainsi, chaque marin intranaute aurait la possibilité de disposer en première page d’un bouquet d’informations l’intéressant tout particulièrement.
Les étapes ultérieures
Diverses évolutions sont à l’étude. Certaines sont particulièrement avancées ; la plupart sont le résultat d’une coopération soutenue entre les différents organismes du ministère.
Elles peuvent être décrites à l’aide de trois idées-forces : ouverture, sécurité, travail collaboratif.
Ouverture - C’est le rapprochement avec Ader, le réseau interadministrations. L’instruction ministérielle 8192 qui n’autorise pas le raccordement à des réseaux ouverts sur l’Internet est en cours de réexamen.
C’est aussi l’arrivée prévue pour 2004 dans la marine de l’application Accord, application intégrée, commune à tous les ministères, de suivi et de contrôle des dépenses de l’État et de la recette.
C’est encore l’expérimentation par la DGA d’une passerelle sécurisée, projet Sismel, entre le portail de la DGA et l’Internet. À terme, cette expérimentation va provoquer par transitivité la connexion de l’Intramar à l’Internet.
Sécurité - C’est le projet d’infrastructure de gestion de clé du ministère de la Défense. L’objectif sera de disposer sur les intranets du ministère d’un outil permettant d’échanger et de travailler en toute sécurité et en toute confiance sur des écrits dématérialisés. Grâce à ce moyen, des écrits conservés au format électronique ne seront pas répudiables. Lors de leur transport ils seront non modifiables par des tierces personnes. Enfin une signature électronique sécurisée permettra de garantir l’authenticité de l’émetteur d’un document.
Travail « collaboratif » - La marine poursuit le projet baptisé Calliope qui doit, à partir de 2004, commencer à mettre en service les premiers ensembles du futur système de gestion électronique documentaire de la marine. Une harmonisation avec Intramar se fera naturellement. Ce projet très vaste apportera de nouvelles possibilités de travail, notamment dans le domaine de la gestion des connaissances.
Conclusion
Les développements successifs et très rapides du monde de l’Internet sont souvent présentés par les intranautes les plus passionnés comme des modèles à rallier au plus tôt. L’angélisme peut-il devenir une règle quand les risques en matière de sécurité de l’information sont si grands au regard de l’intérêt attendu ? Quelle sécurité voulons-nous ? Pourquoi accepter que de nouveaux outils viennent changer les comportements et les façons de travailler au sein des organisations ? Autant de questions sur lesquelles experts et autorités se penchent avec détermination et réalisme, se rappelant que dans ce domaine aussi, le mieux peut rapidement devenir l’ennemi du bien. ♦
(1) NDLR - Intranet : réseau informatique interne, utilisant les techniques de l’Internet, accessible aux seuls membres d’un même groupe (Le Petit Robert). Par extension nous avons accepté « intranaute » ; transposition à l’intranet de l’internaute, qui est, toujours selon Le Petit Robert, l’utilisateur du réseau Internet.