Cet article est extrait du livre : La Guerre moderne dans les trois dimensions, en cours d'édition aux Grandes Éditions françaises.
Stratégie de mer et de l'air (I)
Lorsqu’on a étudié le caractère, les buts et les résultats des opérations maritimes au cours des siècles, on est tenté de chercher dans quelle mesure les règles qui en découlent pourraient s’appliquer aux opérations aériennes. En dehors des principes généraux de l’art militaire, il en est, en effet, qui sont particuliers aux milieux maritimes et aériens, car ce qui distingue ces deux théâtres de celui de terre, c’est essentiellement que l’homme ne peut ni y subvenir à ses besoins, ni y demeurer, ni en altérer l’infrastructure. Ce ne sont, économiquement et militairement que des déserts qui n’ont d’intérêt que comme zones de passage invulnérables à condition de disposer de véhicules spéciaux dont la réalisation exige une technique poussée.
De ce point de vue, il n’y a entre les possibilités de circulation par mer et par air que des différences d’échelle sous le rapport de la puissance portante, de la capacité unitaire des véhicules, de leur rapidité et de leur autonomie ; différences qui se sont manifestées également sur mer entre les origines et nos jours au fur et à mesure des progrès techniques. Il résulte de cette analogie que : d’une part, sur mer comme dans l’air, la lutte n’a pas pour but la possession permanente d’une zone plus ou moins étendue de l’un ou l’autre milieu mais qu’elle a pour enjeu l’exclusivité des possibilités de passage à des fins économiques et militaires ; d’autre part, cet enjeu n’est pas décisif en lui-même mais est une condition nécessaire pour pouvoir intervenir indirectement ou directement dans la lutte au sol.
On peut nous objecter que les « principes » de la guerre navale dont nous faisons état sont souvent remis en cause lors de l’apparition des armes nouvelles et que par conséquent il n’y a aucun intérêt à essayer de les transposer dans l’air. Nous pensons cependant que cet exercice peut être fructueux, non pas pour tenter d’imposer une « doctrine », mais pour évoquer des idées qui peuvent contribuer à former le jugement, ce qui doit être le but essentiel des études militaires. Nous allons donc résumer, selon nous, les enseignements de dix siècles de guerre sur mer, dans les deux ordres d’idées évoqués plus haut, c’est-à-dire lutte pour l’exclusivité du passage et action contre la terre ennemie, puis nous comparerons avec les enseignements de la guerre aérienne.
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