Éditorial du général d'armée Alphonse Juin, chef d'état-major de la Défense nationale, dans le premier numéro de 1945 de la Revue des Questions de Défense nationale .
Victoire !
La Revue des Questions de Défense nationale reparaît après une absence de cinq années. Elle renaît au souffle de la Victoire et dans la Liberté reconquise comme tout ce qui, en France, avait un caractère proprement national.
Ces cinq années d’épreuves ont vu notre défaite suivie de l’occupation ennemie. Mais elles ont vu aussi la résistance extérieure et intérieure se durcir chaque jour davantage et la France, descendue aux abîmes, réapparaître glorieusement dans la bataille avec des forces sans cesse accrues.
Dans le conflit mondial, notre Pays, trop longtemps sous le joug et tributaire de nos Alliés, n’a pu, à vrai dire, que faire l’expérience du malheur et celle du courage d’un grand nombre de ses enfants. L’effroyable mêlée des peuples les plus puissants de la terre a donné lieu à une autre expérience, la plus vaste de tous les temps, du fait de la puissance et du nombre de moyens de destruction mis en oeuvre comme de la diversité et des dimensions des théâtres d’opérations continentaux et maritimes.
Sans infirmer pour autant les grands principes fondamentaux de la conduite des guerres et des batailles toujours valables quels que soient le progrès technique et les différences d’échelle, des procédés nouveaux se sont fait jour, marqués notamment par une interdépendance de plus en plus étroite des armes et de la généralisation des attaques sur les arrières. La guerre s’est étendue à tous les domaines, à toutes les branches de l’activité nationale exigeant de chacun un effort total dirigé vers un seul but : La Victoire.
Ce sera la tâche de la nouvelle Revue des Questions de Défense nationale de se pencher sur cette expérience tumultueuse de la folie destructrice des humains et d’en dégager des leçons profitables. Ce sera sa tâche également de remuer des idées qui puissent servir aux constructions de l’avenir.
Elle sera ouverte à toutes les compétences et à tous les penseurs de bonne volonté qu’anime le souci de la grandeur et de la sécurité françaises. ♦
Juillet 1945