Dans un précédent article, la collusion des puissances entourant l’Asie centrale – Russie, Chine et Iran – face à « l’intrus américain » a été décrite. Depuis, l’engagement limité, mais évident, des États-Unis en faveur de la révolution kirghize des tulipes vient d’indisposer encore plus les dictateurs locaux : qu’ils soient ouzbek, turkmène, tadjik ou kazakh, les despotes centre-asiatiques, qui se tournent de plus en plus vers Moscou, s’attendent désormais au pire de la part de Washington. Ils n’ont pas tort : l’inévitable effet « domino », qui s’exercerait à partir d’une Kirghizie devenue démocratique, risquerait de susciter au coeur de la région une explosion aux effets incalculables. Aussi, dans le cadre d’une exacerbation du « Très Grand Jeu », peut-on s’attendre, si le nouveau pouvoir à Bichkek joue la carte américaine ou ne contrôle pas la situation intérieure, à l’instauration d’un véritable « cordon sanitaire », y compris par la Chine, autour de la petite république. L’installation d’une véritable démocratie est-elle possible en Kirghizie alors que le grand vainqueur, à l’issue des récents événements, n’est autre que la narcomafia qui étend son emprise sur le Sud du pays ?