Les situations auxquelles font face les forces américaines dans le « Triangle sunnite » irakien, la force française Licorne en Côte d’Ivoire ou l’armée israélienne dans les « Territoires occupés » illustrent bien le type de conflits auxquels nous continuerons vraisemblablement à être confrontés dans un avenir prévisible. Il s’agit d’engagements essentiellement non-conventionnels, avec des adversaires « asymétriques » cherchant à atteindre nos vulnérabilités plutôt qu’à s’engager dans un affrontement direct. Sans préjuger de l’issue des conflits en cours, les difficultés rencontrées, notamment en Irak, doivent nous inciter à nous interroger sur la façon d’aborder cette sorte d’opérations et tout particulièrement la phase de stabilisation dont dépend le retour à la normale.
Conflits asymétriques et stabilisation, l'illusion de la bataille décisive
Asymmetric conflicts and stabilisation, the illusion of the decisive battle
There are three situations which clearly show us the types of conflict which we can expect in the foreseeable future. These are:
• the situation facing the American forces in the ‘Sunni Triangle’ in Iraq;
• the French Operation Licorne in Côte d’Ivoire;
• the Israeli Army in the Occupied Territories.
These are essentially ‘non-conventional’ operations, against an ‘asymmetric’ enemy, who seeks to exploit our vulnerabilities rather than to engage us in open combat. Without prejudging the outcome of these conflicts, the difficulties encountered (notably in Iraq) should encourage us to reflect on the best way to undertake these operations, and in particular the stabilisation phase which must precede any return to normality.
La complexité accrue de l’environnement, des impératifs nouveaux ou simplement redécouverts (adaptabilité aux menaces, interopérabilité interarmées voire interministérielle, retenue dans l’action, etc.) imposent plus que jamais souplesse et réversibilité dans nos modes opératoires (1) et conduisent à remettre à l’honneur une approche indirecte. Malgré l’adage aussi contestable que répandu, « qui peut le plus » est loin de pouvoir, nécessairement, le supposé « moins »… À cet égard, il est très instructif de revenir, dans le sillage de Gallieni ou de Lyautey, à certains enseignements tirés de notre expérience coloniale.
Soyons clairs toutefois, il ne s’agit pas de négliger les capacités d’une armée apte à affronter et à vaincre un ennemi de nature conventionnelle — même si notre implication dans un tel scénario demeure improbable, on ne peut faire d’impasse sur la défense de nos intérêts vitaux et stratégiques à long terme — mais de mieux se préparer aux phases de stabilisation où le succès s’avère être un objectif plus aléatoire. En effet, « cette phase, où le politique ne doit jamais perdre de vue quels sont les buts à atteindre et où le militaire doit être prêt à reprendre à tout moment ses capacités de coercition, semble être la plus importante car elle risque d’être la plus longue, la plus coûteuse peut-être, la plus délicate sans nul doute » (2).
L’adversaire asymétrique : de quoi s’agit-il ?
Les interventions récentes le montrent : nos forces ont de plus en plus à faire face à des bandes armées de type guérilla, des groupes terroristes ou des foules manipulées provoquant manifestations hostiles et émeutes, sans oublier les groupes criminels organisés qui gangrènent l’appareil d’État des pays en crise.
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