Les quatre ouvrages que nous regroupons dans cette chronique ont, au premier abord, peu de points communs. Pourtant, de la philosophie de Luc Ferry à la nécrologie que Marie-France Garaud consacre à la Ve République, on pourrait sans abus les relier d’un fil conducteur : le trouble que « la mort de Dieu » a semé dans nos sociétés. On commencera par Luc Ferry, dont la philosophie englobe notre sujet.
De la mort de Dieu, du trouble qui résulte de sa disparition
Pourquoi vit-on et comment doit-on vivre ? Ce sont d’étranges questions (1). Il y a bien longtemps que les hommes ne se les posaient plus, ayant trouvé dans leurs religions réponse satisfaisante. L’Occident a récusé ces billevesées, nous voici revenus à la case départ. C’est bien là que Luc Ferry se situe, disant que, Dieu mort, il nous est désormais nécessaire « d’apprendre à vivre », ce pour quoi la philosophie est notre seul recours. En avant ! jeunes gens sans foi, puisque c’est à vous qu’on s’adresse.
Du passé, les modernes ont fait table rase. Qu’y avait-il donc, avant eux, sur la table du savoir-vivre ? Luc Ferry en retient deux grands moments, chacun d’eux exposé en trois rubriques, théorie (ou connaissance), éthique (ou morale), sagesse (ou quête du salut).
Premier moment, le stoïcisme antique. Il importe de révérer le divin cosmos (théorie), d’y occuper sa juste place (éthique), de s’en tenir à savourer l’instant sans se bercer d’espoir (sagesse). Les stoïciens, si l’on peut dire, ont fait école : les disciples de Bouddha ne veulent déranger rien ni personne, et chez nous Nietzsche prêche l’amor fati, sorte de carpe diem un peu plus solennel. L’auteur eût pu noter, au passage, que cette sagesse passive prend une autre allure lorsqu’elle se mue en confiance en Dieu et accueil de sa grâce.
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