Marine nationale - Le BPC Mistral dans l'opération Baliste : réactivité, efficacité et crédibilité
Accepté contractuellement par la Marine nationale le 27 février 2006, le bâtiment de projection et de commandement BPC Mistral, bien que non admis au service actif, a été engagé du 19 juillet au 27 août au large du Liban. Cette opération, baptisée Baliste, a démontré la parfaite adaptation du BPC aux missions pouvant lui être confiées et les qualités intrinsèques du bâtiment.
Réactivité tous azimuts
Lorsqu’à la mi-juillet, le conflit entre Israël et le Hezbollah éclate, le BPC Mistral est à quai depuis vingt jours. Son acceptation, fin février, par l’état-major de la Marine a déclenché le processus qui doit conduire le second bâtiment de la flotte par son tonnage à son admission au service actif au début de l’automne.
La première étape de ce processus mène le BPC Mistral, du 21 mars au 31 mai, en Atlantique, en Méditerranée et en océan Indien dans le cadre d’une traversée de longue durée (TLD) destinée à vérifier ses caractéristiques militaires. Ces deux mois sont l’occasion de tester les installations de ce grand bâtiment amphibie caractérisé par des capacités aéronautiques, hospitalières et de commandement inédites.
Une semaine après son retour à Toulon, le Mistral appareille de nouveau avec près de 75 véhicules et blindés de l’Armée de terre, 480 fantassins et une quinzaine d’hélicoptères Puma et Gazelle de l’Alat. Pendant quinze jours, les capacités du bâtiment et l’aptitude opérationnelle de son équipage sont testées dans le cadre des exercices BAM et Caïman.
Le 19 juin, le ministre de la Défense, vient à bord du Mistral. Elle assiste à une démonstration dynamique au cours de laquelle lui sont présentées les capacités d’évacuation de ressortissants dont dispose ce type de bâtiment.
Le 24 juin, l’équipage du Mistral est placé en bordées de permission et les techniciens de DCN investissent le bâtiment afin de solder le « reste à faire » et les « appels en garantie » issus des essais menés depuis le 27 février.
Le samedi 15 juillet, le BPC Mistral reçoit l’ordre de se mettre en état d’appareiller. Dès lors, marins et techniciens vont œuvrer heure après heure pour achever certains travaux, remonter des équipements et compléter les diverses soutes du bâtiment. C’est une mobilisation non seulement du bâtiment mais de l’ensemble des organismes de soutien qui permet d’accueillir dès le 17 juillet les premiers éléments de l’Armée de terre, ralliant de différentes garnisons.
Le 19 juillet, au cœur de la nuit, le BPC Mistral s’engage dans les passes de la rade de Toulon vers sa toute première mission opérationnelle. Cet appareillage sur alerte constitue une grande réussite pour ceux qui, depuis 1997, œuvrent pour accroître et moderniser les capacités amphibies de la marine.
Efficacité
Les exercices BAM et Caïman avaient démontré la pertinence des choix en matière d’architecture navale retenus pour le programme BPC : des volumes importants au service d’une grande polyvalence.
L’arrivée en zone Baliste du Mistral offre au contre-amiral Xavier Magne et à son état-major une plate-forme idéale de commandement de l’opération. Les 900 m2 de la zone PC et ses 150 stations de travail « plug and play » permettent une installation aisée de cet état-major de force.
Dès le 25 juillet, le BPC Mistral est à Beyrouth. Il y embarque près de 1 200 ressortissants désireux de quitter le Liban. Cette première rotation met immédiatement en avant les capacités d’emport d’un BPC. À lui seul, le hangar hélicoptères permet d’accueillir plus de 400 personnes. En quatre rotations entre Beyrouth et Larnaka ou Mersin, le Mistral a permis le rapatriement de 4 753 personnes. Tout est fait à bord pour rendre la traversée aussi normale que possible, avec notamment la mise en place d’un service continu pour assurer à toutes ces personnes un repas chaud. Le dévouement des marins, marsouins et légionnaires apporte un réconfort précieux à ces familles désireuses de rentrer en France ou en Europe.
Les équipes du Service de santé des armées prennent en charge environ 10 % des rapatriés. Les 900 m2 de plateau hospitalier et les 69 lits médicalisés leur permettent d’apporter les soins nécessaires.
Soumis à un blocus dès le début des hostilités, le Liban est, courant août, à court de tout. Le port de Beyrouth, débordant habituellement d’activité, est au point mort. La France, avec ses moyens militaires, sera parmi les rares à apporter un ravitaillement d’urgence au pays des Cèdres. Le Mistral, grâce à ses capacités d’emport et à son équipage renforcé des militaires du 121e Régiment du Train, va acheminer près de 1 500 palettes de fret humanitaire, soit à quai au port de Beyrouth, soit par opération amphibie à Saïda.
À la mi-août, la France décide, après avoir été la seule à la soutenir logistiquement durant le conflit, de renforcer les moyens de la Finul. Dès le 19 août, 50 légionnaires du 1er Régiment Étranger du Génie sont débarqués par les moyens amphibies du Mistral vers la plage de Naqourah. Ce premier renfort est suivi six jours plus tard par celui des 200 hommes du 13e Régiment du Génie qui rejoignent Naqourah grâce à une opération amphibie impliquant les TCD Siroco et Foudre et le BPC Mistral sous la protection de la FASM Montcalm et de la FAA Cassard.
Cette protection permanente apportée par les frégates Jean Bart, Jean de Vienne, La Fayette, Cassard et Montcalm en zone de danger missile avéré a été un facteur déterminant dans l’utilisation des bâtiments du groupe amphibie. Leur veille permanente et leur capacité de protection antimissiles ont permis aux « amphibiens » de s’approcher au plus près des zones de combat pour mener à bien leurs missions de rapatriement ou de ravitaillement.
Le 27 août, lorsqu’il quitte la zone, le constat est éloquent : plongé avant même son admission au service actif au cœur de son métier, le BPC Mistral a démontré la pleine mesure de ses capacités.
Crédibilité
« Faire bien et le faire savoir » : l’opération menée depuis le 15 juillet par le BPC Mistral en Méditerranée orientale et au Liban s’inscrit parfaitement dans cette citation du général Bigeard. En effet, le dernier-né de la Marine a rempli sans problème ni restriction toutes les missions qui lui ont été confiées, sous la protection de frégates spécialisées.
L’opération Baliste a permis de confirmer le rôle des grandes unités amphibies pour les opérations de projection dans des situations complexes associées aux phases initiales des crises (risques, absence d’aménagements portuaires…). Ces capacités amphibies, accrues de manière sensible avec le Mistral puis en 2007 du Tonnerre, offrent une grande palette d’options et une souplesse importante pour la gestion de cette période délicate, permettant en particulier d’adapter au mieux la posture d’engagement sur le terrain des militaires français.
L’opération Baliste sera riche d’enseignements. D’ores et déjà, la définition du programme BPC, réalisée conjointement par la Marine et l’Armée de terre, s’avère d’une grande pertinence. Pour un coût maîtrisé, la Marine nationale a pu renouveler ses capacités amphibies.
Dans un monde secoué par de nombreux conflits et catastrophes humanitaires, les BPC constituent, avec d’autres moyens, un outil très efficace de gestion des crises. Aptes à projeter des forces à des milliers de kilomètres du territoire national, les BPC sont aussi capables de projeter, de la même manière, la solidarité de notre pays. Sans nul doute, pour nombre de nos compatriotes, de ressortissants étrangers et de Libanais, le Mistral a, cet été, contribué à souffler un vent d’espoir sur le Liban. ♦