Le XXe siècle
Le XXe siècle
Décrire, résumer, et commenter l’histoire du XXe siècle que celui-ci fût court, comme l’a écrit Éric Hobswann (1914-1989), ou qu’on lui assignât un cadre plus large, n’est assurément pas chose aisée en un espace relativement limité. C’est ce qu’a fort bien réussi Marc Nouschi, professeur de chaire supérieure, dans la troisième édition revue et augmentée de son ouvrage devenu un classique. Il ne s’agit pas d’une simple description chronologique, événementielle, mais bien d’un ensemble cohérent, ordonné et réfléchi, dans lequel on se plonge avec délice.
La première partie « Les temps du siècle » s’interroge sur la naissance du siècle. À quels événements fondateurs l’historien peut-il se référer pour en marquer le véritable début, dès lors qu’il ne veut pas rester lié par le cadre calendaire ? 1885, invention du vaccin contre la rage par Louis Pasteur paraît précoce. 1895, alors avec les frères Lumière, inventant le cinéma, Röntgen les rayons X, et Freud découvrant l’inconscient ? 1900 tout bonnement avec l’exposition universelle de Paris, la théorie des quanta de Max Planck ou l’interprétation des rêves de Freud ? 1905 paraîtrait plus appropriée avec le premier événement géopolitique, la victoire japonaise sur la Russie, la première d’un pays de couleur sur un pays européen ? 1914, 1919 ? Dans ce laps de temps les éléments principaux qui vont façonner le siècle se mettent en place. Une économie monde, le système américain de fabrication, Spencer et le darwinisme social, les prémices de la démocratie sociale… Défilent alors autant de périodes qui scandent le siècle. Les temps tragiques, (1914-1918), ceux du désordre, de l’idéologie (bolchevisme, fascisme, nazisme), mais aussi la première vague de la décolonisation, les temps des crises (1929, Weimar, New Deal), des affrontements (Seconde Guerre mondiale, guerre froide), les temps glorieux (plan Marshall, la dissuasion, la pax americana, la décolonisation), les temps obscurs (fin des trente glorieuses, disparition de l’URSS, le nouveau Moyen-Âge, le choc des civilisations). On voit que ces temps ne sont pas linéaires, ils se chevauchent, une vague submergeant l’autre. Vision un peu kaléidoscopique, que certains pourront contester, mais qui a le mérite de faire réfléchir.
Dans une deuxième partie plus courte d’une centaine de pages, l’auteur présente les grands traits de la civilisation du XXe siècle. Le monde est devenu un, ce qui comporte des aspects tant positifs que préoccupants (avion, ère du jet), mais aussi terrorisme aérien, règne de l’automobile, et congestion des villes, pollution. Le « village planétaire » a vu l’explosion des communications de masse, les multimédias, certainement le facteur le plus innovant pour l’économie mondiale comme le remarque Alan Greenspan dans ses mémoires récemment parues. Mais il y a aussi l’homme contre l’homme, c’est-à-dire la rupture des grands équilibres, l’écologie, les grandes pandémies. Heureusement que tout n’apparaît point négatif avec la description en final des grandes consciences du siècle où figurent en premier lieu les intellectuels engagés (Romain Rolland, Jean-Paul Sartre, Raymond Aron), les hommes de lettres (André Malraux), les Églises, celle de Jean-Paul II qui effaça les silences du pape, l’humanitaire, les arts et la culture. L’histoire du XXe siècle vérifie les théories d’Einstein sur la relativité. Certes elle a connu de tels écarts absolus et relatifs entre uniformité et diversité des temps, entre impression de lenteur et sentiment d’accélération de la temporalité. Peuton cependant remettre en cause les progrès de la science et de la médecine, l’allongement de la durée de vie et des loisirs, un enrichissement général, même s’il reste inégalitaire et décalé. C’est sur une vaste échelle temporelle qu’il convient de replacer le XXe siècle, à défaut de pouvoir le juger. Marc Nouschi en présente tant d’aspects que chaque lecteur en sortira enrichi et mieux à même d’en juger. ♦