La forte croissance actuelle du nucléaire civil dans le monde induit une aggravation des risques inhérents au secteur : sûreté des installations, sécurisation du cycle du combustible, lutte contre les trafics de matière fissile, dommages possibles à l’écologie locale (consommation d’eau par exemple), etc. Relayant l’inquiétude de l’opinion, des spécialistes s’interrogent aujourd’hui sur notre capacité collective à maîtriser ces risques. Le nucléaire ayant besoin d’un environnement « ultra-sécurisé », sur quelles bases fournir aujourd’hui à certains pays des technologies et des matières, alors même que leur situation ou leur environnement sont lourds de menaces ?
Nouvelles tensions sur le nucléaire civil
L’actualité de la question vient de ce qu’il nous faut aujourd’hui appréhender le problème des risques nucléaires de façon globale, là où la communauté internationale a apporté des éléments de réponse partiels depuis les années 1970.
Les fondements de l’« ordre nucléaire » ont été posés par le Traité de non-prolifération (1), lequel a créé des droits et des devoirs pour les pays à une époque où ceux qui possédaient l’arme étaient aussi ceux qui maîtrisaient la technologie « civile ». L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a établi des normes et des standards de référence ainsi qu’un système d’accords et de garanties « en vue d’empêcher que l’énergie nucléaire ne soit détournée de ses utilisations pacifiques vers des armes nucléaires ou d’autres dispositifs explosifs nucléaires (2) ». Enfin, le comité Zangger puis le Groupe des fournisseurs nucléaires (Nuclear Suppliers Group ou NSG) (3) ont établi des listes de biens exportables liés à la technologie nucléaire, afin de limiter là encore les risques de prolifération.
Cependant, cette approche juridique et technique, indispensable et qui s’est révélée assez efficace, apparaît aujourd’hui insuffisante. Cela vient de ce que toutes les composantes de la sécurité — entendue au sens large — dans le domaine nucléaire sont devenues plus complexes, notamment du fait de la multiplication considérable des paramètres à prendre en compte, et doivent désormais faire l’objet d’un traitement systémique. Autrement dit, la « renaissance » nucléaire oblige à repenser le lien entre, d’une part, le développement du parc des centrales atomiques dans le monde et, d’autre part, l’approche internationale et coopérative des questions de sécurité, de sûreté et de non-prolifération nucléaires.
Il reste 93 % de l'article à lire
Plan de l'article