Correspondance - Les périodes d'entraînement
J’ai lu avec le plus grand intérêt l’article du colonel Bouvet sur « Cadres de réserve et Défense nationale », publié dans la Revue de Défense Nationale (numéros d’octobre et novembre 1951). En tant qu’officier de réserve, affecté à une Grande Unité d’Intervention, je crois nécessaire, pour éclairer l’opinion, de reprendre certains points qui m’ont particulièrement surpris, car ils font état d’une situation qui ne correspond pas, à mon avis, à la réalité. Je n’ai pas du tout l’intention d’engager une polémique avec l’un de nos experts militaires, je veux simplement opposer ce que j’ai vu, lors de la convocation verticale de ma Division effectuée en automne dernier, à certaines affirmations du colonel Bouvet.
Dans le numéro d’octobre de la Revue de Défense Nationale, cet officier supérieur semble poser en principe (1) que mobiliser veut dire « faire d’une troupe de civils qui ne se connaissent pas, une unité cohérente… » Cette conception me paraît loin de la réalité, à en juger par ce que tous les réservistes ont pu constater, avec moi, l’été dernier. C’est précisément pour nous permettre de nous connaître, dès le temps de paix, que le commandement nous a réunis. Nous avons effectué ensemble une période d’entraînement, chacun étant à sa place de combat. Maintenant, je connais mes gradés et mes hommes. Nous avons manœuvré et vécu ensemble. Déjà un esprit d’équipe nous unit et nous avons pris conscience de nos possibilités respectives. Quand nous nous sommes quittés, le rendement de nos équipes était satisfaisant ; nous n’étions plus une troupe de civils sans cohésion. Tous jeunes, sachant bien que, si la guerre éclatait demain, nous irions ensemble au feu, nous nous sommes promis de garder le contact. Nous profiterons de toutes les occasions pour nous réunir, étant tous domiciliés dans la même région, comme le veut le caractère local de notre mobilisation accélérée.
Pour ma part, j’ai confiance dans mon unité ; elle est en mesure de faire face à ses missions. Je compte participer régulièrement aux séances individuelles d’entraînement qui seront organisées pour mes petits cadres et moi-même. Si bien que je retrouverai une unité prête à poursuivre un bon entraînement collectif, lors de notre prochaine convocation verticale. Je tenais à apporter le témoignage de ce que j’ai vécu récemment. J’ajoute que des contacts pris avec des camarades, officiers de réserve comme moi, me donnent à penser que nous étions nombreux, cette année, à subir l’entraînement collectif dont je viens de parler. Il me semble que l’instruction des réserves dans le cadre de l’unité mobilisée a été, à juste titre, généralisée par le Commandement.