Présentation
Ce colloque s’inscrit très exactement dans la ligne des efforts que nous avons faits ces derniers mois pour contribuer à la réflexion sur les changements politiques et stratégiques intervenus dans le monde depuis l’année dernière. Telle était en effet l’une des missions que le Comité d’études de défense nationale, son conseil d’administration et sa direction s’étaient données. Rien n’était plus important, à notre avis, que de résister à la tentation d’un immobilisme, faussement déguisé en prudence, et d’un parti pris d’ignorance à l’égard des événements qui survenaient et des conséquences qui allaient en résulter. Rien n’était plus important, au contraire, que d’en mesurer l’ampleur et d’en tirer les conséquences.
C’est ce que nous nous sommes appliqué à faire en publiant dans la revue Défense Nationale une série de textes où les auteurs s’efforcent, chacun librement et à sa façon, de proposer les leçons qu’il faut retenir des transformations radicales survenues à l’Est de l’Europe, de la disparition du dispositif politique et stratégique que l’Union soviétique y avait établi après la Deuxième Guerre mondiale et du changement qui s’ensuit pour les rapports de forces sur le théâtre européen. Simultanément, nous avons préparé et organisé la journée d’études du 22 mars dernier, consacrée précisément aux pays de l’Est, en raison de leur transformation, et aux dimensions sociologiques, politiques, diplomatiques et militaires du bouleversement qui s’y produit.
Mais encore fallait-il que l’on réfléchisse sérieusement aux conséquences à en tirer pour l’effort de défense des pays occidentaux et, avant tout, de la France elle-même. Il ne suffit pas de dire, en effet, que, la situation de l’Europe ayant évolué, il faut tout changer. La tâche que nous avons à mener à bien, à tous les niveaux de responsabilité auxquels nous nous situons, est de discerner précisément ce qui doit demeurer parce que cela répond à des données permanentes, à des périls inchangés ou aux exigences constantes de la défense nationale, et ce qui, au contraire, doit être impérativement adapté aux conditions nouvelles et, en particulier, au nouveau rapport entre les deux parties de l’Europe.
En ce sens, la réunion que nous tenons aujourd’hui est, en quelque sorte, la suite logique de la journée d’études que nous avons organisée en mars dernier. Elle porte en effet sur un aspect essentiel de la défense de la France : sa stratégie de dissuasion nucléaire. Ce qu’elle est aujourd’hui, ce qu’elle doit être à l’avenir, les menaces auxquelles elle répond, la sécurité qu’elle garantit à la France, les systèmes d’armes qui en assureront à l’avenir l’efficacité et donc la crédibilité, mais aussi les conditions politiques générales dans lesquelles se situeront les choix stratégiques français et en particulier les décisions à prendre pour notre stratégie de dissuasion nucléaire : tels sont les sujets que nous avons choisi de vous proposer aujourd’hui.
Prendront successivement la parole : M. Pierre Dabezies, président de la Fondation pour les études de défense nationale ; le général d’armée aérienne (CR) Jean Saulnier, ancien chef d’état-major des armées ; l’ingénieur général de l’armement Paul-Ivan de Saint Germain, directeur du Centre des hautes études de l’armement. Je les en remercie.