Actions, déclarations et contradictions devant la crise du Golfe
La crise du Golfe, loin d’être locale, affecte l’ensemble du monde arabe, et, au-delà, les relations entre celui-ci et les Occidentaux. Elle remet en question le rôle des États-Unis et de l’Union Soviétique dans les affrontements régionaux. Ce sont là des réalités évidentes, encore que ces réalités, ou tout au moins leurs manifestations, changent rapidement, rendant périmées en quelques jours les réflexions que l’on tente de formuler. L’exercice mérite cependant d’être tenté, d’abord pour ce qui concerne le monde arabe, puis le monde occidental avec les États-Unis et l’Europe, enfin l’Union Soviétique.
Proche-Orient
L’annexion du Koweït est survenue à un moment où le marché pétrolier manifestait des signes de reprise, où l’Égypte et la Syrie se rapprochaient, où les deux Yémens digéraient leur fusion, où les derniers rebondissements de l’affaire libanaise montraient que les irréductibles du camp chrétien perdaient de l’influence au profit de ceux qui, dans le même camp, penchaient vers des compromis, où le conflit israélo-arabe, sans pour autant s’orienter vers une ébauche de solution, ne donnait pas lieu à des épisodes tragiques. Au total, une période de calme relatif, laissant intacts les problèmes, certes, mais sans les aggraver.
Le choc en fut d’autant plus rude. L’invasion irakienne provoquait aussitôt de nouveaux regroupements ou dislocations, en agissant comme le plus vif des révélateurs. Les dissensions ont été soulignées au sommet extraordinaire de la Ligue arabe, convoqué au Caire le 10 août, c’est-à-dire huit jours après le déclenchement du conflit. Destinée à éviter l’internationalisation de celui-ci, la réunion lui a, au contraire, apporté une caution, et a provoqué une scission telle que le monde arabe, où pourtant les divisions ne sont pas rares, n’en a jamais connu. La Tunisie, siège officiel de la Ligue jusqu’au mois de mars, n’a pas répondu à la convocation. Les autres participants se sont partagés en plusieurs camps. Douze ont voté pour une résolution condamnant les menaces irakiennes contre les pays du Golfe, demandant le rétablissement de la souveraineté du Koweït et acceptant le déploiement de forces non seulement arabes mais internationales dans le Golfe, ainsi que le boycottage de l’Irak. Ce sont les six États du Golfe — Arabie, Bahreïn, Oman, Qatar, Émirats arabes unis, et naturellement Koweït — ainsi que l’Égypte, la Syrie, le Maroc, le Liban, Djibouti et la Somalie. La Jordanie, le Soudan et la Mauritanie ont exprimé des réserves sur la résolution. L’Algérie et le Yémen se sont abstenus. L’Irak, la Libye et l’OLP ont voté contre la résolution. Celle-ci a donc été adoptée à une faible majorité (douze voix favorables sur vingt-deux membres).
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