Les origines du drame indochinois
Le 2 septembre 1945, le Viet-Minh, après s’être emparé du pouvoir, proclame l’indépendance de l’Indochine et rompt brutalement les liens qui la rattachaient à la France. « Les Français, déclare-t-il, nous ont dans le domaine politique privés de toute liberté, ils ont réduit notre peuple à la plus noire misère et saccagé impitoyablement le pays… Notre peuple a brisé toutes les chaînes qui ont pesé sur nous depuis près de cent ans ».
La réalité était tout autre, le peuple n’avait rien brisé. Il avait, à la suite du coup de force japonais du 9 mars 1945, assisté à notre agonie et s’était laissé entraîner par une poignée de révolutionnaires, dans une aventure tragique, persuadé, sous l’effet d’une propagande mensongère, que la France était définitivement rayée du nombre des grandes puissances et se trouvait dans l’impossibilité de reprendre sa place en Extrême-Orient. Notre défaite lui apparaissait comme une désapprobation du ciel, et il se devait, suivant un usage plusieurs fois millénaire, de chercher un autre maître. Le Viet-Minh, poussé par l’étranger, favorisé par les circonstances du moment, lui dictait son choix et, avec une rare audace, s’imposait. Il allait puiser sa force dans l’idée d’indépendance, le « Doc Lap » véritable symbole magique qu’il prétendait incarner. Pour mieux asseoir son autorité, il déclenchait une campagne de dénigrement et de haine contre les Français et contre ceux qui leur avaient prêté appui. Le grand lettré Pham Quynh qui avait vanté nos bienfaits et affirmé « que la conquête de l’Indochine par la France était une fatalité historique et une nécessité politique » payait de sa vie de tels propos.
L’Indochine d’autrefois
Cependant l’œuvre accomplie était présente dans les esprits qu’elle avait profondément marqués de son empreinte et dans les choses qui leur étaient devenues familières. Qu’il suffise de rappeler dans quel état se trouvait l’Indochine au moment de notre arrivée. Elle était alors entièrement fermée à la vie moderne, dépourvue de communications, à l’exception des voies d’eau naturelles et de quelques canaux ; les épidémies sévissaient sans qu’il existât aucun moyen pour les combattre, la piraterie dévastait le Tonkin septentrional, la famine régnait partout. En bref, le pays présentait un visage tourmenté, ravagé par les calamités. Des rivalités sanglantes opposaient les peuples annamite, laotien et cambodgien qui y étaient implantés.
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