Alors que l'opération Tempête du désert mise en œuvre par la coalition menée par les États-Unis pour libérer le Koweït de l’Irak a abouti, l’auteur fait un parallèle avec la guerre de Corée, l’autre guerre de l’ONU.
Corée et Koweït : les deux guerres de l'ONU ; leçons et perspectives
25 juin 1950 : 90 000 Coréens du Nord, dotés de blindés soviétiques, envahissent la Corée du Sud. Le même jour, le Conseil de sécurité demande le retrait des troupes nord-coréennes. Le 27 juin, il adopte un projet de résolution américain recommandant aux États membres de soutenir la Corée du Sud. Le 25 septembre, les forces des Nations unies reprennent Séoul. La coalition comprendra des forces de 17 pays, l’essentiel étant fourni par les États-Unis (75 000 hommes sur 150 000 à la fin de 1950) (1).
2 août 1990 : 100 000 Irakiens, dotés de blindés soviétiques, envahissent le Koweït. Le même jour, sur proposition américaine, le Conseil de sécurité exige le retrait des forces irakiennes. Le 29 novembre, il autorise les États membres à user de tous les moyens nécessaires pour obtenir l’évacuation du Koweït. Le 17 janvier 1991, les forces coalisées déclenchent les opérations qui mèneront à la libération du Koweït. La coalition groupera des troupes de 29 pays, le contingent américain étant fort de 510 000 sur 700 000 (2).
La similitude est frappante. Dans les deux cas, l’Organisation des Nations unies a réagi immédiatement pour condamner l’agression, puis a couvert de son autorité les opérations de libération. Dans les deux cas aussi, le rôle des États-Unis a été déterminant, tant par les pressions exercées sur le Conseil de sécurité que par la part prise dans la conduite et l’exécution des opérations, jusqu’au succès final (3). Pour la Corée, comme pour le Koweït, le syndrome de Munich a pesé lourd dans les décisions. Truman et Trygvee Lee d’un côté, Bush et Perez de Cuellar de l’autre, étaient marqués par l’humiliation de 1938 et n’étaient pas disposés à céder devant ce nouvel Hitler que l’on voyait en Saddam Hussein. Pourtant, avant que les invasions n’aient lieu, aucune voix occidentale ne s’était levée au Conseil de sécurité pour dénoncer les vues hégémoniques de Kim Il-sung ou celles de Saddam Hussein et mettre en garde les futurs agresseurs. Au contraire, le secrétaire d’État américain Dean Acheson, s’exprimant le 12 janvier 1950 devant le National Press Club, avait nettement laissé entendre que la Corée du Sud ne faisait pas partie (à la différence du Japon, des Ryukyu et des Philippines) du « périmètre défensif » des États-Unis. « C’était presque, évidemment, appeler l’invasion », commente André Fontaine (4), qui poursuit : « Comment d’ailleurs supposer que l’Amérique, qui avait laissé, sans intervenir, les communistes s’emparer de toute la Chine, allaient se battre pour un petit morceau de Corée, que ses troupes avaient évacué l’année précédente ? » Pareil feu vert avait été donné au chef d’État irakien par le sous-secrétaire d’État John Kelly, déclarant le 31 juillet 1990 devant le sous-comité « Moyen-Orient » de la Chambre des représentants (en réponse à une question de Léo Hamilton) : « Nous n’avons pas de traité de défense avec les États du Golfe. C’est clair ».
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