C'est à partir des différentes crises qui se sont déroulées dans le golfe Arabo-Persique, en particulier la dernière qui a abouti à une guerre, que l'auteur, ancien président de notre Comité et directeur de la revue, nous fait part de ses idées sur la logique de crise et ce qu'il appelle la diplomatie navale. Le thème l'intéresse depuis de nombreuses années, et les récents événements au Proche-Orient lui ont permis d'enrichir ses réflexions.
Les crises du Golfe vues de la mer
Tout paraît avoir déjà été dit au sujet de la récente crise du Golfe, celle qui s’est terminée en guerre du Golfe du fait de la logique dans laquelle se sont enfermés ses acteurs. Mais on peut cependant constater que la spectaculaire victoire aéroterrestre sur laquelle elle a pris fin a complètement occulté ses aspects maritimes. Nous voudrions donc ici relever d’abord les plus caractéristiques de ces derniers et rappeler ceux des crises qui l’ont précédée dans le Golfe, puis esquisser une typologie de la gestion des crises à partir de la mer pour la mettre à l’épreuve de ces cas concrets, enfin essayer d’envisager son évolution à la suite des bouleversements que subit actuellement la géopolitique de notre planète.
Les principaux aspects maritimes de la guerre du Golfe
L’Irak n’est pas un pays maritime, et il en souffrait, puisque c’est l’aspiration à un plus large accès à la mer qui l’a poussé, entre autres raisons, à s’emparer du Koweït. Cette situation ne l’empêchait d’ailleurs pas de dépendre étroitement de la mer pour l’exportation de son pétrole, c’est-à-dire pour la quasi-totalité de ses revenus. Le fait que, depuis la longue guerre qu’il avait menée précédemment contre l’Iran, ce pétrole transitait pour la plus grande partie par des pipe-lines débouchant, à travers la Turquie, en Méditerranée et, à travers l’Arabie Séoudite, en mer Rouge, ne faisait que déplacer géographiquement cette dépendance. La situation de l’Irak au fin fond du golfe Arabo-Persique le rendait par contre apparemment peu vulnérable à des attaques venant de la mer. Cependant, il n’en possédait pas moins une marine de guerre aux capacités non négligeables, ainsi qu’une marine marchande d’une certaine importance.
Si nous portons maintenant notre regard du côté américain, nous constatons que, hormis le bâtiment de commandement et les quelques bâtiments légers de la Middle-East Station basée en Oman, les États-Unis n’avaient aucune force navale dans les parages du Golfe le 2 août 1990, au moment de l’agression de l’Irak contre le Koweït. Le groupe aéronaval (« Carrier Battle Group ») de l’océan Indien, constitué autour du porte-avions Independance, était alors en relâche à Diego Garcia, c’est-à-dire à 5 000 kilomètres environ du détroit d’Ormuz. Ayant reçu immédiatement l’ordre d’appareiller, il arrivera dans le Golfe le 7 août, et le même jour un autre groupe aéronaval constitué autour du porte-avions Eisenhower pénétrera en mer Rouge, venant de Méditerranée. Deux autres groupes aéronavals les rejoindront le 27 août.
Il reste 92 % de l'article à lire
Plan de l'article