Dans de nombreux articles et chroniques sur le service national, nous n'avons que très peu évoqué le Service militaire adapté (SMA), en place dans nos DOM-TOM, et dont l'objectif essentiel est de donner une formation professionnelle à des jeunes qui, sans cette chance, pourraient bien être définitivement victimes du chômage. L'auteur nous présente une synthèse de cette forme de service national : son histoire, ses succès, ses difficultés, son avenir.
Outre-mer : le Service militaire adapté (SMA)
Le 21 décembre 1960, par décision du Conseil des ministres, le service militaire adapté (SMA) est créé. À l’instigation de M. Michel Debré, alors Premier ministre, c’est une forme particulière de service qui voit le jour dans les DOM-TOM (1). Dans un premier temps, cependant, le SMA limitera son implantation aux Antilles-Guyane. Il a pour philosophie de s’intéresser à la situation spécifique de l’outre-mer. Comme son nom l’indique, il doit s’adapter aux conditions locales : un chômage endémique, une jeunesse désœuvrée, une absence d’infrastructure économique, une révolte qui gronde… La décolonisation qui s’achève donne aux Antillais et Guyanais le sentiment d’être abandonnés par la métropole.
Les besoins des armées étaient depuis toujours fort limités dans les territoires français d’Amérique et les jeunes gens n’effectuaient donc pas de service militaire ; il était en outre trop coûteux de les affecter en métropole du fait du voyage. Ceux-ci sont donc placés en « congé budgétaire » et se sentent d’autant plus rejetés de la communauté nationale. Les carences du service militaire aux Antilles-Guyane étant une des causes du malaise régnant, il est proposé de lier les deux problèmes en s’attachant à créer un service qui réponde à des besoins concrets ; peu importe qu’ils ne soient pas militaires. Le SMA est une première approche d’une notion élargie de la défense. Elle n’est plus alors seulement une question de stratégie ou du nombre de divisions, mais touche aussi à la cohésion nationale, à la puissance économique, à la capacité industrielle et aux mutations sociales. Pour lutter contre le chômage et la sous-qualification, le SMA apprend aux appelés un métier. L’armée fait de la formation professionnelle, générale et militaire. Elle participe ainsi à la lutte contre le chômage. Le service militaire retrouve ses objectifs originels et historiques que sont la cohésion sociale et l’intégration. De nouvelles missions confiées au service militaire apportent donc une réponse aux questions posées par le sureffectif aux Antilles-Guyane.
Une telle révolution dans l’utilisation du service national heurta certaines sensibilités. Certains civils ou militaires n’y voyaient que des tâches civiles confiées à des militaires. Une partie de l’armée rechignait à appliquer cette transformation « civile » de sa fonction pendant que certains élus locaux craignaient une « militarisation » de la société. Dès 1963, le SMA fait cependant l’unanimité et, en 1965, il s’étend à La Réunion qui connaît les mêmes difficultés de chômage et de « mise en congé budgétaire » des appelés du contingent. Dans les années 80, le SMA s’étend aux territoires d’outre-mer et aux collectivités territoriales : en 1986, la Nouvelle-Calédonie, en 1988 Mayotte et en 1989 la Polynésie française.
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