Les tentatives de décrochage de la Hongrie dans la Seconde Guerre mondiale
Le 9 septembre 1943, des représentants autorisés du gouvernement hongrois signaient à Constantinople, en présence de sir Knatchbull-Hugessen, ambassadeur de Grande-Bretagne en Turquie, l’acte de reddition sans conditions de la Hongrie. En février 1945, les troupes hongroises luttaient encore avec acharnement, rue par rue, dans Budapest en ruines. Ce paradoxe, qui n’est pas l’un des moindres de la dernière guerre, peut servir à caractériser le drame des États satellites et l’intérêt que peut présenter, pour tous les belligérants, une étroite coordination de la conduite militaire et de la conduite diplomatique de la guerre.
Le 27 juin 1941, prenant prétexte d’un imaginaire bombardement de deux villes hongroises par des avions soviétiques, la Hongrie déclare la guerre à l’U. R. S. S. Depuis cinq jours, la Wehrmacht est engagée dans sa foudroyante offensive vers l’Est. En lui apportant un concours immédiat, bien que limité, le gouvernement Bardossy lie davantage le destin de la Hongrie à celui du Reich, qui, par trois fois en deux ans, lui a permis d’accroître son territoire. On croit à Budapest que c’est seulement dans le sillage des nations dynamiques que la Hongrie retrouvera dans l’Europe danubienne la place dont le traité de Trianon et l’hostilité de la Petite Entente l’ont frustrée. L’amiral Horthy, Régent du royaume, laisse faire. Ancien aide de camp de l’empereur François-Joseph, fidèle à un conservatisme social tout proche du statut féodal, il admettrait difficilement l’application à la Hongrie des principes hitlériens, mais — le souvenir de Bêla Kuhn aidant — une croisade antibolchevique ne saurait lui déplaire, pas plus qu’a la majorité de l’aristocratie et de l’état-major, où l’éducation à l’allemande a été fréquente, et à une bonne part des classes moyennes, où l’on brigue déjà, dans le domaine commercial, la place jusque-là occupée par le million de juifs hongrois.
Il y a pourtant une opposition. Elle n’est pas dans le peuple, auquel on ne saurait demander de défendre un régime assez peu soucieux de lui, mais d’une part dans des partis organisés, petits propriétaires, libéraux, social-démocrates, extrême-gauche, qui s’expriment le plus souvent par la voix du député petit-propriétaire André Bajcsy-Zsilinsky et, d’autre part, parmi toutes les classes de la société, dans les éléments germanophobes et antinazis qui ne voient pas sans inquiétude s’étendre les empiétements de l’hitlérisme. En vain cette opposition a-t-elle protesté contre l’adhésion au pacte antikomintern, contre la participation hongroise aux mesures militaires contre la Yougoslavie, et contre la déclaration de guerre à l’U. R. S. S., estimée illégale pour n’avoir pas été soumise au Parlement.
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