Désarmement et orientations stratégiques en Europe occidentale (novembre 1992)
En ces lendemains de guerre froide, comme après les grands conflits de ce siècle, les États d’Europe sont entrés dans une phase de réduction significative de leur effort militaire ; mais, à la différence des années qui suivirent 1918 et 1945 et auxquelles succéda bientôt un effort de réarmement, on assiste maintenant à une entreprise de désarmement relativement coordonnée et qui concerne l’ensemble du continent. Du moins était-ce le point de départ des réductions de forces et de crédits auxquelles on procéda d’abord ; après quoi chaque État s’engagea dans sa propre voie, dictée le plus souvent par des préoccupations budgétaires.
C’est l’ensemble de ces évolutions que l’on va prendre en compte ici ; mais on le fera avec beaucoup de précautions : les changements qui se produisent dans le contexte international comportent de nombreux aléas, les politiques des États peuvent en être affectées différemment selon leurs intérêts et leur position géographique et stratégique, des conflits limités peuvent survenir qui entravent leurs efforts d’économie. La prudence, ici, s’impose d’autant plus que les décisions prises par les gouvernements, le plus souvent, ne sont pas encore définitives ou qu’elles n’entrent en application que progressivement. Réservant le cas de la France, qui a été évoqué à bien des reprises dans cette revue et qui sera marqué par l’adoption d’une nouvelle loi de programmation militaire couvrant les deux prochaines années, on se bornera aux exemples de quelques pays européens membres de l’Alliance atlantique, dont les choix sont particulièrement significatifs des évolutions en cours.
Le cadre dans lequel devaient en principe s’inscrire les réductions de forces en Europe a été fixé par un accord signé le vendredi 10 juillet 1992 à Helsinki par les vingt-neuf pays se rattachant à la Conférence pour la sécurité et la coopération en Europe (CSCE). Cet accord concluait les négociations sur le désarmement conventionnel des pays membres de l’Alliance atlantique et du Pacte de Varsovie, et il complétait le traité signé à Paris en novembre 1990 qui portait plus généralement sur la réduction des armements conventionnels dans la zone comprise entre l’Atlantique et l’Oural. La caractéristique principale de l’accord était de fixer les plafonds d’effectifs que les signataires s’engageaient à respecter : de ce fait, ils devenaient obligatoires et ne pouvaient être modifiés que par accord général des signataires. Ces plafonds, portant sur l’Armée de terre, étaient de 345 000 hommes pour l’Allemagne, de 325 000 pour la France, de 260 000 pour la Grande-Bretagne, de 1 450 000 pour la Russie et de 450 000 pour l’Ukraine. Les États-Unis s’étaient fixé un plafond de 250 000 hommes, très supérieur à celui qu’ils ont l’intention d’atteindre en Europe dans les prochaines années.
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