Réflexions stratégiques sur la guerre d'Indochine
L’armistice de Genève, en mettant fin à une longue guerre qui durait pratiquement depuis août 1945, a établi, pour une durée impossible à fixer, une nouvelle situation stratégique dans le Sud-Est asiatique et dans le Monde. À tout le moins, il s’agit d’une trêve. Et pendant cette trêve, les militaires ont le devoir de réfléchir, de faire leur examen de conscience et de tirer de l’étude du passé des leçons pour l’avenir.
Délaissant le point de vue purement tactique, nous voudrions montrer ici que le conflit indochinois, si limité qu’il ait pu être, suggère des réflexions extrêmement générales sur le plan de ce que les Anglo-Saxons appellent la « grande stratégie ».
La première réflexion est relative à l’emploi des armes de destruction massive. Le conflit d’Indochine opposait le Vietnam, soutenu militairement par la France et recevant de l’Amérique une aide économique et financière ainsi que des armes et des munitions, au Vietminh, qui recevait de la Chine et de la Russie une aide du môme ordre, ne comportant cependant ni troupes, ni cadres. Il représentait donc, comme la guerre de Corée, une guerre civile nationale chaude insérée dans le cadre plus général de la guerre froide internationale qui oppose depuis 1945 l’Ouest à l’Est. Nous avons évoqué à maintes reprises, dans cette revue même, les caractéristiques des guerres de masse et des guerres techniques. Et nous avons été amenés à conclure que le camp qui n’a pas pour lui la masse — et surtout une masse bien tenue en main par des cadres fanatisés — risque de se trouver automatiquement conduit, s’il veut vaincre, à jouer au maximum de la carte technique, sans tenir compte d’aucune considération d’ordre métaphysique. Les armes qui sont à la pointe de la technique sont actuellement les armes de destruction massive (bombes à fission et surtout bombes à fusion). Or, ni en Corée, ni en Indochine, ces armes n’ont été employées. Il est bon d’en rechercher les raisons.
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