De la responsabilité individuelle militaire et de l’action de combat dans un environnement de haute technologie : limites et enjeux. Des rôles respectifs de l’organisation, du système et de l’opérateur. Une analyse qui explore les nouvelles relations entre l’officier, l’engagement et la technique.
Pour une approche systémique de la responsabilité
A systematic approach to responsibility
This article reflects on individual military responsibility and combat in a high-technology environment, noting their limits and challenges. The respective roles of the organization, the system and the operator are examined, as are the new relationships between the officer, combat action and technology.
Par tradition, par culture et par nécessité, les organisations militaires valorisent de façon importante la notion de responsabilité individuelle et plus particulièrement celle de ceux qui sont en situation d’autorité. Héritage d’une époque pas si ancienne où le sort des nations se jouait sur le champ de bataille, le chef militaire est peu ou prou considéré comme responsable de tout ce qu’il advient, que ce soit de l’état des moyens dont il dispose ou de l’issue de la bataille – aujourd’hui des « opérations » – qu’il mène.
En cas d’échec ou d’accident, ces mêmes organisations réagissent de façon quasi systématique en concentrant l’ensemble des erreurs sur la tête d’un seul ou parfois de quelques « responsables » qui, selon les circonstances, sont sanctionnés, démis, bannis, jugés ou même exécutés en application des efficaces principes ancestraux du « bouc émissaire », chers à René Girard (1). Nombreux sont les exemples, y compris récents, où quelques officiers ont ainsi porté sur leur tête la responsabilité d’un accident ou l’ensemble du poids d’une défaite. On se souviendra par exemple du cas du général Bazaine, commandant en chef de l’armée du Rhin, dégradé et condamné à mort après la défaite de 1870 (2) ou du général Gamelin en 1940, jugé par Vichy en tant que responsable de la débâcle, emprisonné en France puis déporté par les Allemands à Buchenwald. Dans les dernières années on pourra pointer le cas de nombre d’officiers mis en cause dans des enquêtes de justice qui ont fini par mettre un terme à leur carrière militaire, qu’ils soient effectivement condamnés ou non.
Compte tenu de ce rôle particulier joué par l’institution militaire dans le sort du pays, il est souvent bien plus commode et rassurant de procéder ainsi. Plutôt que de pointer des faiblesses ou des dysfonctionnements au sein de l’ensemble de l’appareil militaire, avec tout ce que cela peut créer comme inquiétudes au sein du pays et d’opportunités chez l’adversaire, il est en effet plus sage, notamment pour le pouvoir politique, de se focaliser sur la responsabilité individuelle.
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