Moscou, rempart de l'Occident
Vision moyenâgeuse, vieille de sept siècles… L’Asie à l’assaut de l’Europe… Les Mongols d’Ogodaï, fils et successeur de Gengis Khan, poursuivent leur ruée vers l’ouest. Ils arrivent en Occident par la vallée de la Volga. La Russie, morcelée et encore dans l’enfance, subit le premier choc. Le prince de Riazan est écrasé (décembre 1237). George II, prince de Sousdalie, est battu sur l’Oka, puis sur la Sita où il est tué (4 mars 1238). Les Mongols brûlent Vladimir, Moscou, Yaroslav, Tver. En 1240, ils prennent et détruisent Kiev. De là, ils partent pour leur conquête de la Hongrie (1241), dont ils se retireront brusquement pour une question dynastique intérieure, la mort subite d’Ogodaï ayant posé l’épineux problème de sa succession. Mais, dans leur retraite, ils ont laissé comme une alluvion, du Dnieper à l’Oural, le fameux royaume du Kiptchak ou de la Horde d’Or, celui des « Tartares du Ponant », comme on disait au moyen âge, fraction de l’empire mongol qui fixe sa capitale à Saraï, sur la basse Volga.
La Russie est réduite pour longtemps à la vassalité et au servage vis-à-vis de la Horde d’Or. À chaque avènement de prince russe, le prétendant à la fonction doit « aller à la Horde » pour solliciter et recevoir l’investiture du suzerain. La Russie doit en outre payer un tribut annuel en argent et en denrées diverses. Enfin le peuple soumis est naturellement assujetti à de multiples entraves à ses libertés normales.
Dans ces circonstances difficiles, la Russie a su réagir par des moyens uniquement moraux. Sa religion a été le premier d’entre eux. Sa foi orthodoxe a été naturellement la représentation, l’expression du sentiment national. La croix, symbole de la Sainte Russie, est devenue celui de la Russie tout court. Puis le pays s’est attaché à créer une unité nationale, inexistante jusque-là, et à prendre figure d’État. Les Mongols l’y ont inconsciemment aidé, car, trouvant commode de n’avoir affaire qu’à un seul subordonné, ils avaient fait du prince de Sousdalie, de Moscou, le « grand prince de toutes les Russies », collecteur général de l’impôt, ayant autorité sur les autres princes, préparant en cela la grande Russie future. Enfin le malheur et la servitude ont rapproché le peuple russe et ses princes et cimenté une unité morale profonde.
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