L'Arnaque - La finance au-dessus des lois et des règles
L'Arnaque - La finance au-dessus des lois et des règles
Jean de Maillard, magistrat et auteur reconnu, brosse un tableau détaillé et consistant des bulles et des crises de l’économie et de la finance mondiale. D’après lui, la première crise de la mondialisation, due à une gouvernance par la délinquance, a mis en valeur le manque de dynamisme de la presse américaine qui n’est pas allée chercher d’explications aux pratiques douteuses des junk bonds des années 70 et 80.
Quant à la crise des subprimes de 2008, elle est l’aboutissement du cycle du capitalisme débridé qui a donné lieu à une nouvelle forme de criminalité.
Avant d’être économique et financière, la crise est peut-être celle de gouvernements car les États ont laissé les marchés gouverner à leur place. Ils ont feint de croire que la finance de marché se limiterait à créer son propre univers de règles, compatibles avec le leur. Or, le risque financier dicte sa loi à l’économie et montre l’échec de la foi inébranlable de certains dans la fluidité et la rationalité des marchés. En effet, la spéculation, outil de gestion du risque est devenue un moyen d’influencer les marchés. Depuis les années 80, plus le risque présent est important, plus il rapporte.
Après la crise des Savings and Loan, la bulle Internet s’est portée au secours de l’économie américaine en péril. Mais le problème est bien celui de toute l’économie, désormais organisée autour de la finance de marché. Les événements qui se sont déroulés depuis l’éclatement de la bulle Internet ont montré que l’évolution des fondamentaux de l’économie et de la finance n’a pas permis d’enrayer une logique inscrite dans la structure même de l’économie mondialisée sous dépendance anglo-américaine.
Un autre aspect de cette crise est celui d’une économie saisie par la fraude. L’impact de celle-ci dans le secteur des prêts subprimes ne peut pas être évalué directement, mais on peut être sûr qu’une extension massive a eu lieu. L’explication de la fraude est à chercher dans le rôle qu’elle remplit dans le fonctionnement des sociétés. La légitimité économique de ceux qui mettent en place de tels moyens de fraude va empêcher la répression de ces pratiques délictuelles. Cette organisation de la fraude sous le couvert du droit a servi, et sert encore, à favoriser le recours au travail clandestin dans les grandes entreprises.
Par un choix de titres teintés d’humour corrosif, l’auteur s’attaque sans ménagement aux États, ainsi qu’aux acteurs privés. En effet, pour lui, la fraude peut également être vue comme une alternative à la politique. La criminalité devient systémique quand le système politique, économique et financier ne peut plus se passer d’elle. De plus, la criminalité systémique englobe l’ensemble des manifestations délinquantes et frauduleuses qui permettent de remplir une ou plusieurs des fonctions sociales dont la gestion publique est défaillante.
Forcés de proposer des réponses à la crise de la finance mondiale, les pays du G20 ont entrepris une réforme des places offshore. Les places financières internationales ont néanmoins fixé le prix de leur coopération : la reconnaissance des paradis réglementaires. La résolution de la crise financière a même aggravé les choses : la faillite de nombreuses banques a entraîné une concentration de la finance sur quelques géants qui dictent leur loi car ils savent que les gouvernements attendent d’eux la sortie de la crise économique.
Cette étude dense de la crise des subprimes est destinée à un public ayant déjà de solides notions d’économie et montre au moins une chose : la vie quotidienne des citoyens ordinaires dépend désormais étroitement de ce qui se passe sur les marchés financiers. ♦