Dans cette première partie, l’auteur, un expert reconnu d’Asie centrale, esquisse les conditions dangereuses d’un départ forcé de la coalition en 2014 et offre une grille d’explication régionale à la posture militaire attentiste des États-Unis. Il continue de militer pour un repli rapide du dispositif sur l’Asie centrale.
Afghanistan : danger de mort ! (1/3)
Afghanistan: deadly danger! (1/3)
The author, a recognised expert on Central Asia, outlines in this first part the dangerous conditions surrounding the coalition’s enforced departure in 2014, and gives some regional explanations for the United States’ delaying posture. He continues to call for a rapid withdrawal of our forces in Central Asia.
En décembre 2009, dans un article intitulé « Pour un redéploiement de l’Otan en Asie centrale » publié dans Défense nationale et sécurité collective, nous avons fait, à propos de la guerre en Afghanistan, le constat suivant : « Face à une vendetta impitoyable qui dédaigne les souffrances et pertes endurées, une sortie de guerre « tête haute » doit être envisagée pendant qu’il est encore temps. Elle s’effectuerait dans les deux ou trois ans qui viennent, c’est-à-dire avant que la nasse d’une insurrection généralisée ne se referme sur le corps expéditionnaire ». Plus loin, nous indiquions que le Turkestan ex-soviétique – l’Asie centrale utile – donnait encore la possibilité d’un repli et que cette région très riche devait être protégée à partir de l’Afghanistan du Nord.
Deux ans après, nous maintenons ce point de vue bien que les Américains, à force d’erreurs et d’hésitations, compliquent le retrait. Après avoir analysé l’attitude des États-Unis ainsi que la menace afghane, nous évoquerons le scénario qui nous paraît, si l’on n’y prend garde, le plus probable : une guerre civile peu à peu étendue à l’Asie centrale. Il s’agira ensuite de définir une réponse à cette menace : sans pour autant compromettre à l’avenir l’unité de l’Afghanistan, ce serait le retrait de nos troupes d’un Afghanistan du Sud incontrôlable et indéfendable vers le territoire de l’Alliance du Nord – apparue en 2001 entre les grandes ethnies du Nord (Tadjiks, Hazaras, Ouzbeks) – et, au-delà, le Sud de l’Asie centrale. La défense, notamment contre la drogue, de « l’Asie centrale utile » et de l’Europe, Russie comprise, serait assurée à partir de cette zone.
Il faut partir à point !
Les États-Unis viendraient encore de manquer le coche ! Selon certains, l’exécution de Ben Laden au Pakistan, le 2 mai 2011, aurait dû être, pour l’Amérique, l’occasion de proclamer la victoire, puis de se dépêtrer au plus vite du bourbier afghan. À l’opposé, le président Obama a reporté, le 23 juin 2011, de trois ans le repli en confirmant son achèvement à la fin de 2014. Par ailleurs, il a commis une maladresse en annonçant le calendrier du retrait : c’était faire preuve de faiblesse et se mettre dans la gueule du loup par rapport à une population pachtoune qui ne respecte que la force. Enfin, comment croire à la fidélité des 300 000 militaires et policiers afghans maintenant qu’ils savent que, à l’instar du président Nazhibullah en 1992, ils vont être laissés pour compte ?
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