Politique et diplomatie - L'Autriche recouvre son indépendance
Dix années ont passé depuis la victoire totale remportée par les Alliés sur l’Allemagne hitlérienne et bientôt les traces que l’état de guerre avait laissées en Europe auront été effacées. Les deux pays encore occupés à la fin de 1954 auront sans doute cessé de l’être à la fin de 1955. L’Allemagne, ou plutôt la République fédérale allemande, bien que privée de son ancienne capitale, Berlin, bien qu’amputée de dix-huit millions d’Allemands de la République démocratique, est entrée officiellement le 5 mai en qualité de partenaire de plein droit dans la communauté des nations occidentales : l’OTAN et l’UEO. Soyons assurés qu’elle y jouera un rôle de premier plan.
L’Autriche de son côté est sortie depuis quelques semaines, de la situation paradoxale où l’avait placée le hasard des opérations qui marquèrent la fin des hostilités en Europe centrale. Il était étrange en effet que l’Autriche, première victime de l’expansionnisme hitlérien fût encore, — au moins symboliquement — occupée en 1955 alors que l’Italie et le Japon, principaux acteurs de la deuxième guerre mondiale dans le camp des vaincus, ne l’étaient plus depuis longtemps. La fin de l’occupation et la reconquête de la souveraineté totale, promises par la déclaration de Moscou de novembre 1943, étaient pour l’Autriche conditionnées par la signature d’un traité de paix, qui ne pouvait être conclu que si les quatre puissances occupantes en approuvaient les termes. La situation était la même, du point de vue juridique pour l’Allemagne ; mais alors qu’en Allemagne l’impossibilité de parvenir à un accord entre les quatre occupants avait conduit l’U. R. S. S. et les trois occidentaux à transformer la zone orientale et l’ensemble des 3 zones occidentales en des États et à les traiter comme tels, en Autriche une même évolution ne s’était pas produite et ne pouvait pas se produire. Une coupure de l’Autriche à la limite de la zone d’occupation soviétique eût été désavantageuse pour tout le monde, pour les Autrichiens d’abord : mais aussi pour l’U. R. S. S. et pour les Occidentaux. Elle se fût d’autre part heurtée à l’obstacle constitué par un gouvernement central autrichien ayant dès 1945 compétence sur l’ensemble des quatre zones.
C’est donc, sur la voie de la négociation pour un traité d’État, que tant bien que mal s’est appliqué, pendant dix ans, l’effort des Occidentaux. Rappelons quelques étapes de cette longue marche d’approche : Les négociations sur l’Autriche s’engagent en janvier 1947. À la fin mars de la même année, on résume les points d’accord et de désaccord : parmi ces derniers figure en première ligne la question des avoirs allemands en Autriche, que l’U. R. S. S. revendique comme prise de guerre. L’identification de ces biens ou plutôt leur définition précise est difficile et cependant indispensable : l’Autriche ayant fait partie de l’État allemand depuis l’Anschluss de 1938 jusqu’à 1945, de très importants investissements allemands y ont été effectués. En février 1948 un accord est réalisé sur l’essentiel des dispositions économiques ; mais depuis lors, l’U. R. S. S. fait dépendre la signature du traité d’État de la solution d’autres questions : les revendications territoriales yougoslaves, la question de Trieste, le problème allemand…
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