Laperrine
M. Léon Lehuraux, directeur des territoires du Sud de l’Algérie, vient d’écrire la vie du général Laperrine dons la collection Les grands coloniaux. Aucun auteur n’était mieux qualifié pour décrire une carrière aussi mouvementée, en un cadre qui avait conquis le général Laperrine dès sa sortie de Saint-Cyr. Il débute en Algérie, nous le suivons au Soudan, où il devient l’élève d’Archinard, et rêve de réaliser la jonction entre l’Afrique du Nord et l’Afrique Noire.
De retour en Algérie, après un court séjour en France, sa compétence dans les questions sahariennes lui fait conférer le poste de commandant supérieur des oasis sahariennes à peine conquises. C’est un organisateur, rien ne lui échappe, et son activité s’étend à toutes les questions qui peuvent intéresser les Sahariens. On suit avec intérêt la progression de l’organisation des territoires du sud, la création des compagnies sahariennes, qui vont permettre à ce grand colonial de poursuivre le rêve de sa jeunesse. Les Touaregs s’opposent à notre avance : il les combat, les défait et les apprivoise. Sa persévérance a raison de l’obstination de Moussa ag Amastane, qui devient un allié fidèle.
Les grandes reconnaissances de Laperrine à travers le Sahara, ses premiers contacts avec les Soudanais ne sont pas encourageants, mais il persévère, va à Taodeni, puis se heurte aux Ajjert. Ses lieutenants, dont Nieger, occupent Djanet ; lui-même traverse encore une fois le Sahara et il amène alors ses Chambaa à Gao, puis à Niamey, où il signe avec le colonel Vénal la convention de Niamey, qui met fin à la question irritante des frontières entre Algérie et Soudan. Ses démêlés avec les Turcs de Tripolitaine sont à peine effleurés ; toutefois la pacification du Sahara est complète quand, en 1910, le colonel Laperrine rentre en France. Mais il reste tenu au courant des questions qui le passionnent par le Père de Foucauld qu’il laisse à Tamanrasset.
Vient la guerre de 1914-1918, où Laperrine fait brillamment son devoir. Les Touaregs poussés par l’étranger, abondamment pourvus d’armes, se révoltent, enlèvent Djanet et obligent à évacuer Fort-Polignac ; Agadès est assiégé. La situation est grave et le général Lyautey, ministre de la Guerre, pour coordonner les différentes actions, crée le Commandement supérieur temporaire des territoires sahariens et en confie le poste au général Laperrine, qui obtient de suite une section d’autos sahariennes et une escadrille. La situation évolue rapidement grâce aux contre-rezzous et, après deux raids, l’un sur Tombouctou, l’autre sur Agadir, la paix est rétablie.
En 1919, le Commandement supérieur temporaire est supprimé et le général Laperrine prend le commandement de la division d’Alger. Remplaçant le général Nivelle à bord de l’avion d’une escadrille qui doit traverser le Sahara et aboutir au Niger, le général Laperrine est victime de la brume de sable qui empêche l’avion de reconnaître sa route et c’est en plein Tanezrouft que Laperrine, grand Saharien, trouve la mort.
Le récit de M. Lehuraux est très intéressant ; il analyse avec perspicacité les faits et gestes du général Laperrine au cours de sa carrière. Les Sahariens trouveront là des conseils précieux pour la vie dure, mais prenante, qu’ils ont choisie ; les plus jeunes y trouveront un exemple des qualités dont ont fait preuve Laperrine et son équipe : mépris de la fatigue et du danger, patriotisme ardent, volonté de pacifier après avoir vaincu.