Recruter et fidéliser dans un contexte de déflation des effectifs et de crise socio-économique est une gageure. En comprendre les ressorts et les leviers est une tâche rendue complexe par la variété des métiers et des filières d’armées redevenues forces d’emploi régulier ces dernières années. Les auteurs nous proposent une analyse fine de la situation actuelle et des évolutions à venir.
Recruter et fidéliser : nouvel impératif catégorique de l’armée française ?
Recruitment and retention: an absolute necessity for French armed forces
Recruitment and retention at a time of socio-economic crisis, and when personnel numbers are being cut, are almost impossible tasks. Performing them is made even more complex by the variety of trades and channels within the forces that have evolved over recent years. The authors give their analysis of the current situation and of future developments that might be expected.
Depuis 1996, date de la mise en œuvre de la professionnalisation des armées, le ministère de la Défense fait l’apprentissage des difficultés à recruter du personnel militaire de manière permanente tout en mettant en œuvre un format d’armée en contraction constante. Si les données présentées dans la Loi de programmation militaire 2009-2014 font état d’un besoin de recrutement annuel d’environ 30 000 militaires par an, ce chiffre doit désormais prendre en compte l’objectif de réduction de 54 000 personnes d’ici 2014, dont 48 887 pour le seul programme P178 (préparation et emploi des forces).
Cet effort sans précédent dans l’un des ministères régaliens pourrait, à première vue, constituer une aubaine pour le ministère de la Défense lui permettant d’atteindre aisément ses objectifs de recrutement. Or, une telle conjecture constitue un trompe-l’œil pour au moins trois raisons. La première tient à la dynamique du processus de recrutement qui ne se limite pas au premier contrat d’engagement mais aussi à la fidélisation au sein des forces armées. La deuxième tient aux déterminants socio-économiques du recrutement qui influencent, non seulement, le nombre de recrues mais surtout la qualité des personnels engagés. Enfin, la troisième raison est d’ordre plus structurel au sens où les besoins de chaque armée varient substantiellement, ayant pour conséquence de définir une politique et une stratégie de recrutement « à la carte » et « ciblés » dont les paramètres sont largement indépendants des facteurs macros favorables à l’heure actuelle (chômage élevé, contraction du format).
Recrutement et fidélisation des personnels, fondations d’une politique militaire
La question de la politique de personnels des armées s’inscrit d’abord dans la (re)définition des missions des armées (1). La tendance principale est que les armées professionnelles occidentales disposent de format resserré, s’appuyant sur un personnel peu nombreux qui met en œuvre des matériels de haute technologie, utilisant pleinement les techniques de la révolution de l’information, dans des engagements complexes alliant combat de haute intensité et savoir-faire contre-insurrectionnels dans le cadre de coalitions multinationales. Dès lors, elles sont amenées à privilégier le recrutement d’un personnel tendanciellement de plus en plus qualifié, à la formation coûteuse et soumis à une forte concurrence avec le secteur privé (2).
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