Union française - L'actualité en Tunisie - Les opérations en Indochine - Cyclone à Madagascar
L’actualité en Tunisie
Depuis longtemps la Régence n’avait plus connu un calme aussi grand que celui qui a régné pendant le mois de janvier 1953. C’est à peine si trois ou quatre bombes et une grève avortée des commerçants le 30 janvier « pour commémorer le souvenir des victimes du Cap Bon » ont marqué ces quatre semaines. Par ailleurs, les responsables de plusieurs attentats antérieurs ont été identifiés et déférés aux tribunaux. Des condamnations ont été également prononcées. M. de Hautecloque s’est rendu à Paris le 10 janvier pour avoir des entretiens avec les membres du nouveau Gouvernement. On peut espérer que la période d’agitation, voulue et entretenue dans le dessein, partiellement atteint seulement, d’impressionner l’Assemblée générale des Nations unies, est close, qu’une période plus constructive va s’ouvrir et que les deux interlocuteurs sauront la mettre à profit.
Notons encore qu’une délégation de la Commission internationale contre le régime concentrationnaire invitée par l’Union générale des travailleurs tunisiens et autorisée par le Gouvernement français, a visité le camp de Tataouine où vivent 131 éloignés politiques, ainsi que plusieurs camps désaffectés. Une autorisation du ministre de la Défense nationale a été également obtenue par la délégation pour visiter la prison militaire où sont incarcérés 34 civils. De retour à Bruxelles, elle va rédiger un rapport qui sera communiqué au Gouvernement français et au Bey avant d’être rendu public.
Les opérations d’Indochine
Les opérations de harcèlement, d’embuscade et d’attaque de postes ont été nombreuses dans toutes les zones névralgiques habituelles. Mais aucune attaque de grande envergure n’a été enregistrée ni en pays thaï, ni dans le delta du fleuve Rouge. Toutefois, des combats très durs ont eu lieu pour assainir certaines zones d’infiltration vietminh dans le sud du delta. Par contre, le Viet-Minh a tâté notre dispositif sur un nouveau point : les plateaux moïs. Il a, en effet, déclenché le 13 janvier 1953 une offensive dans la région d’An Khe (bordure Est des pays montagnards, à 400 kilomètres de Saïgon). Ayant mis en action des forces importantes, dotées d’armes lourdes, canons sans recul et mitrailleuses antiaériennes, il s’est emparé de quelques petits postes non sans nous causer certaines pertes. Par la suite, l’indécision du Viet-Minh, peut-être gêné par la nature particulièrement hostile de la région, nous a permis de renforcer considérablement nos défenses. Après l’inquiétude des premiers jours, il est apparu très vite qu’une action en profondeur n’était plus permise au Vietminh.
Au surplus, le 29 janvier, les forces franco-vietnamiennes débarquaient en force à Qui Nhon, port de la côte d’Annam, situé à 60 kilomètres à l’est d’An Khé. Cette opération, réalisée par surprise, a parfaitement réussi et les deux compagnies vietminh, qui se trouvaient dans la ville n’ont pu opposer que peu de résistance. Aussitôt des commandos se sont enfoncés vers l’Ouest dans le double dessein de contrôler l’important nœud routier et ferroviaire de Van Hoï et d’opérer des destructions destinées à gêner le Vietminh dans son action sur An Khé.
Au sujet des activités de l’adversaire dans cette zone, on a émis dans l’entourage du général Salan l’hypothèse que le Vietminh aurait surtout cherché à monter une opération à caractère spectaculaire pour faire oublier son échec en pays thaï et pour servir sa propagande. Celle-ci, en effet, s’est efforcée de s’opposer aux élections municipales qui ont eu lieu le 25 janvier dans tout le Vietnam rallié à l’Empereur Bao Daï. À cette occasion, le Vietminh a usé de tous les moyens de pression en son pouvoir pour intimider les électeurs et les candidats. Il avait, d’ailleurs, annoncé par avance que cette consultation populaire serait un lamentable échec pour le Gouvernement de Bao Daï.
En fait, ces élections, les premières de ce genre au Vietnam, ont été très suivies et se sont déroulées sans incident grave. Plus de 80 % des électeurs sont allés aux urnes et ont voté en parfaite indépendance pour les candidats de leur choix.
Au Cambodge, le roi Norodom Sihanouk se vît contraint de dénouer une crise qui menaçait le fondement même du royaume. On se souvient qu’au mois de juin 1952, le Roi avait déjà dû se décider à prendre la responsabilité du pouvoir et à renverser le ministère démocrate en exercice.
L’Assemblée nationale à majorité démocrate, avait paru accepter le fait mais le vote du budget, que le Roi la pressait d’effectuer avant le 1er janvier 1953, allait lui donner l’occasion de manifester son hostilité. Par ailleurs, il y avait des preuves flagrantes de collusion entre des députés de la majorité et l’ex-Premier ministre Son Ngoc Thanh, créature des Japonais et actuellement en dissidence. L’état d’urgence fut proclamé le 13 janvier, l’Assemblée fut dissoute et de nombreux députés démocrates compromis furent arrêtés par la police cambodgienne sans que le calme de Phnom Penh fût un instant troublé. Bien mieux, les établissements scolaires, fermés à la suite d’attentats terroristes, ont réouvert leurs portes sans incident dès le 19 janvier. Le porte-parole du Roi a annoncé qu’une Assemblée consultative serait créée ultérieurement.
Cyclone à Madagascar
Dans la journée du 13 janvier 1953, un violent cyclone a ravagé l’île de Mayotte aux Comores et la région de Majunga à Madagascar. Des dégâts matériels graves ont été enregistrés à Dzaoudzi, chef-lieu du territoire des Comores. Les bâtiments administratifs ont été très éprouvés. Un grand nombre de plantations de l’île de Mayotte ont été détruites. On ne signale cependant aucune victime. Le ravitaillement de la population sinistrée a été rendu extrêmement difficile.
Dans la ville de Majunga et dans ses environs, le cyclone a causé douze morts et neuf blessés autochtones. On déplore la mort du capitaine de port. Pour la seule ville de Majunga, une première estimation provisoire des dégâts dépasserait un milliard. Les établissements industriels de l’estuaire de la Betsiboka ont été particulièrement atteints. La route Majunga-Tananarive a été coupée en plusieurs endroits par suite des pluies diluviennes qui ont suivi le cyclone et ont provoqué la crue de la Betsiboka et de ses affluents. Par la suite, un raz de marée devait, plus au Sud, inonder la presque totalité de la ville de Monrodava (province de Tuléar).
Dès le lendemain de cette calamité, le ministre a tenu à assurer les populations éprouvées de la sollicitude du Gouvernement. Des propositions de résolution ont été déposées par les parlementaires des régions sinistrées sur les bureaux des diverses Assemblées, sollicitant d’urgence des secours en nature et en espèces.
Il est à noter que le budget des Comores et l’économie de ce territoire n’ont encore pu surmonter totalement l’épreuve du précédent cyclone qui, le 22 décembre 1950, avait causé 600 morts et des dégâts matériels chiffrés à 2 Md. ♦