Otan - Ratification des accords de Paris - À SHAPE - Conférence de Bangkok - Le traité turco-irakien
Ratification des Accords de Paris
En Europe, la ratification des Accords de Paris s’est poursuivie dans les pays intéressés, à l’exception de la France où le débat devant le Conseil de la République a été retardé par la crise ministérielle. Pour l’Allemagne fédérale, le Parlement de Bonn a approuvé l’ensemble des Accords le 27 février 1955, à une majorité de l’ordre des deux tiers après un débat de trois jours. Selon les positions prises par les commissions intéressées du Bundestag, il faut s’attendre à voir soulever, dès l’admission de l’Allemagne à l’Otan, divers problèmes de commandement : celui d’une représentation allemande au Groupe permanent de Washington et une modification éventuelle des limites entre les commandements Nord et Centre-Europe pour que l’ensemble des contingents allemands relèvent d’un seul et même théâtre.
À SHAPE
Le Président du Conseil des ministres italien, Mario Scelba, accompagné des ministres des Affaires étrangères et de la Défense, respectivement Gaetano Martino et Paolo Emilio Taviani, a été reçu au Grand Quartier général des puissances alliées en Europe (SHAPE), le 14 février 1955, et a assisté ensuite à une séance du Conseil de l’Otan. Sa visite a été suivie de celle d’une importante délégation de parlementaires belges.
En voyage d’une semaine aux États-Unis, et parlant le 22 février 1954, à Bismarck devant l’Assemblée du Nord-Dakota, le général Gruenther a souligné devant ses auditeurs l’importance pour la défense de l’Europe d’une participation allemande. « Les douze divisions allemandes », a-t-il déclaré, « ajoutées à la contribution aérienne et navale représentent la différence entre une stratégie médiocre et la possibilité d’une stratégie avancée plus recommandable. Ceci du fait même de l’ère atomique et non malgré elle. Il nous faut un bouclier allié composé de forces aériennes et terrestres suffisamment fort pour interdire à l’ennemi une avance en ordre dispersé. Ce bouclier doit être suffisamment robuste pour imposer à l’ennemi de se concentrer sans percer. Ces concentrations seront alors vulnérables à nos nouvelles armes. L’admission de l’Allemagne occidentale [RFA] à l’Otan fournira la force militaire essentielle non seulement aux membres actuels de l’Otan mais au peuple allemand lui-même. Elle constituera une contribution significative à l’unité européenne occidentale. »
À l’intérieur du commandement allié en Europe, quelques postes importants ont changé de titulaire. À la tête du secteur central de la Méditerranée relevant du commandement interallié de Malte, l’amiral italien Lubrano di Negozio remplace, à la date du 1er mars 1955, l’amiral Girosi. Celui-ci a assisté le 22 février 1955 à Malte à la conférence de commandement qui réunit périodiquement autour du commandant en chef les divers commandants des secteurs méditerranéens.
Sur le théâtre Nord-Europe, le vice-amiral Gladstone doit remplacer, vers le 1er juin 1955, le vice-amiral Sir Edward Evans Lombe commandant les forces navales alliées d’Europe septentrionale.
À SHAPE même, le poste d’adjoint naval au Commandant suprême allié en Europe (SACEUR), tenu depuis les origines de SHAPE par l’amiral Lemonnier, a été renforcé par la désignation du contre-amiral Collett de la marine britannique qui portera le titre de vice-adjoint naval. Cette désignation correspond à l’augmentation continue des questions navales traitées à SHAPE, de même que le développement des questions aériennes avait conduit à nommer, en août 1954, un adjoint, l’Air Marshal Miller, de l’armée de l’air canadienne auprès du général Norstadt.
Conférence de Bangkok
Les représentants des huit États signataires du Pacte de Manille (8 septembre 1954) : États-Unis, Grande-Bretagne, France, Australie, Nouvelle-Zélande, Philippines, Pakistan et Thaïlande se sont réunis à Bangkok du 23 au 25 février 1955. L’objet de cette conférence ministérielle était de donner vie à l’organisation du Pacte connue sous le nom de SEATO. Il a été décidé la création d’un secrétariat permanent siégeant à Bangkok, dont les membres auront rang d’ambassadeur. Chacun d’eux sera assisté d’un conseiller militaire et des experts « économistes » seront chargés d’examiner les moyens de combattre l’infiltration et la subversion dans les pays de l’Asie du Sud-Est. Le Conseil procédera par voie de recommandations aux gouvernements signataires et une réunion plénière à l’échelon ministériel aura lieu au moins une fois par an.
Bien que le texte même du Pacte de Manille soit tout à fait analogue, à celui du Traité de l’Atlantique Nord sur lequel il a été calqué, il n’est pas question pour le moment de créer une force ou un commandement militaire unifié dans cette partie du monde. La première réunion des experts militaires aura lieu en août 1955 à Manille, après quoi ils siégeront régulièrement à Bangkok, siège du Conseil permanent.
En marge de la conférence ont été discutés entre MM. Eden et Foster Dulles les points de vue britannique et américain sur la question de Formose [Taïwan] qui a retenu particulièrement, pendant le mois, l’attention des chancelleries.
Le traité turco-irakien
En procédant, le 24 février 1955 à Bagdad, à la signature d’un traité de coopération mutuelle entre la Turquie et l’Irak, les gouvernements d’Ankara et de Bagdad ont créé au Moyen-Orient une situation nouvelle : l’Iraq se trouve ainsi associé au dispositif militaire occidental, au grand dépit de l’Égypte qui considère ce nouvel accord comme une rupture du pacte de sécurité collective interarabe. Après avoir tout tenté pour éviter cet éclatement de la Ligue arabe, le gouvernement du Caire mène d’actifs pourparlers avec les autres États d’Arabie traditionnellement, hostiles aux visées hachémites. Il en résulte une tension accrue au Moyen-Orient.
Il n’est pas sans intérêt de rappeler que la Turquie était déjà liée au Pakistan par un accord conclu le 2 avril 1954, et que doit s’ouvrir à Ankara, le 1er mars, une conférence balkanique destinée à renforcer l’alliance signée le 9 août 1954 à Bled entre la Turquie, la Grèce et la Yougoslavie. Ainsi se développe non sans quelque incohérence un réseau de pactes de défense passablement imbriqués entre eux et qui laissent subsister trop souvent les rivalités séculaires, comme c’est le cas au Proche-Orient. ♦