Les armées n’ont aujourd’hui pas leur place dans la gestion des problèmes sécuritaires dans les banlieues, celles-ci relevant au premier chef des forces de sécurité publique. Pour autant, il existe un seuil au-delà duquel le pouvoir politique pourrait être amené à revoir sa position de principe et envisager l’emploi de l’outil militaire dans un cadre bien précis.
Au-delà du tabou, l’armée dans les banlieues, ultima ratio regum ? (T 363)
Le 30 août 2012, suite à la vague de règlements de comptes criminels à Marseille, Samia Ghali, sénatrice socialiste et maire des 15e et 16e arrondissements de la cité phocéenne, prônait le recours aux forces armées pour rétablir la sécurité dans les quartiers sensibles (1). Ces propos et les réactions qu’ils ont suscitées ont contribué à rouvrir un débat récurrent.
Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 stipule que « l’État doit (…) garantir la meilleure coordination possible entre, d’une part, le dispositif de sécurité intérieure et de sécurité civile, qui se situe au premier rang face à ces risques et, d’autre part, les forces armées, dont les missions, les capacités et la réactivité doivent être employées, le moment venu, en appui de ce dispositif et selon le cadre d’emploi défini par l’autorité politique » (p. 71). L’instruction interministérielle n° 500/SGDN/MPS/OTP du 9 mai 1995 régit plus précisément la participation des forces armées au maintien de l’ordre. Un tel engagement repose en particulier sur deux principes : l’état de nécessité décrit par la règle des « 4 I » (2) et le respect de l’autorité légitime. Les forces armées ne peuvent intervenir sur le territoire national que sur réquisition et sous la responsabilité de l’autorité civile.
Les banlieues se caractérisent par l’intrication de quatre autres « I » – « immigration, identité nationale, islam et insécurité » (cf. l’ouvrage collectif Banlieue de la République) – auxquels s’ajoutent des enjeux d’aménagements urbains, d’éducation ou encore de politique générale. Sur ce terreau favorable aux zones de non-droit et aux situations explosives, comme en 2005 en Seine-Saint-Denis, les forces de sécurité publique ne sont plus toujours à même de faire respecter de façon pleine et entière l’état de droit.
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