Disparition d'Odile de Vasselot
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La résistante Odile de Vasselot nous a quittés, après 103 ans d’une vie donnée à plus grand qu’elle, au lendemain de Pâques.
En elle retentit d’abord l’appel de l’absolu, au sein d’une vieille famille française, dans une lignée d’officiers de cavalerie qui lui apprit à servir Dieu, son pays et les autres. Petite fille, à Metz, où son père était instructeur de cavalerie, il lui arrivait de partager ses jeux avec un enfant de son âge nommé Philippe de Gaulle, dont le père commandait le 507e régiment de chars.
C’est la voix de ce général de Gaulle qui retentit le 18 juin 1940, et qu’entendit Odile de Vasselot sur un poste de radio artisanal fabriqué par son frère. Du haut de ses 18 ans, elle répondit à cet appel. Son engagement dans la Résistance commença humblement, par ces croix de Lorraine qu’elle dessinait à la craie sur les murs des hôtels allemands, par ces affiches vichystes qu’elle déchirait à l’abri des regards, par cette feuille clandestine qu’elle distribuait, Témoignage chrétien.
Bientôt, Odile prit le nom de combat de « Danièle ». Elle intégra le réseau de résistants Zéro France, qui lui confia des paquets de courriers qu’elle portait de Paris à Toulouse tous les samedis, à l’insu de sa famille, sans savoir ce dont il relevait, si ce n’est qu’elle risquait gros, mais qu’elle le faisait pour la liberté de son pays. Quand on l’interrogeait, bien des années plus tard, sur les ressources de son courage, elle répondait simplement : « Il fallait bien faire quelque chose. On n’a jamais le droit de rester ainsi et de baisser les bras. »
Lorsque le chef de Zéro France fut arrêté et déporté, elle rejoignit le réseau « Comète », pour convoyer des parachutistes anglo-saxons à travers la frontière franco-belge, de nuit, au péril de sa propre vie. Odile n’avait pas vingt ans, mais elle était trop appliquée à sauver la vie des autres pour avoir le temps de craindre pour la sienne.
Vint l’appel religieux. La résistante devint laïque consacrée de la Congrégation Saint-François-Xavier, embrassant pleinement sa mission éducative, sur les pas de Madeleine Daniélou. Son diplôme d’histoire en poche, Odile de Vasselot devint enseignante, puis partit en Côte d’Ivoire, à Abidjan, où elle fonda un collège de jeunes filles, Sainte-Marie d’Abidjan, vite prolongé par un lycée.
En ces années 60 où l’enseignement donné aux filles en Afrique allait rarement au-delà de l’école primaire, elle réécrivit leurs destins, se donna à leur instruction, à leur éducation, corps et âme, tête et cœur. Pendant 20 ans, elle régna sur ces 1 500 jeunes filles et ces 10 hectares avec une autorité et une attention à chacune qui marquèrent les esprits.
Odile de Vasselot ne baissa jamais les bras. À son retour en France, elle entendit un autre appel, celui de la mémoire. Elle prit la plume pour écrire ses souvenirs, Tombés du ciel, témoignage d’héroïsme quotidien qu’elle propagea au fil de conférences par centaines, des grandes écoles aux associations mémorielles. Elle qui avait si souvent défié la mort passa de nombreuses années à adoucir celle des autres, apportant réconfort et écoute aux patients des soins palliatifs.
Le président de la République salue une grande dame dont l’honneur fut de savoir entendre tous les appels de sa vie, et d’y répondre avec un courage qui nous édifie. Il adresse à sa famille, à ses proches, à ses anciennes élèves, à tous ceux qui furent touchés par son témoignage d’engagement, de foi et d’abnégation, ses condoléances émues.
Publié le 22 avril 2025