Judicieuse idée, conçue et réalisée ici par le général Brisset, de présenter une sorte de « Que Sais-je ? » portant sur ce qu’il baptise l’« outil » militaire. Le terme est à première vue surprenant mais à la réflexion bien adapté au but de l’entreprise.
L’ouvrage n’apprendra certes rien aux professionnels auxquels il n’est d’ailleurs pas destiné (encore que d’aucuns d’entre eux, placés dans la même position que Fabrice del Dongo à la bataille de Waterloo, n’aient pas forcément une vue exhaustive de l’institution) mais il vise le lecteur moyen de toute condition, sans limiter le sujet au seul hexagone. Chez nous, et sans doute ailleurs, avec la suppression-suspension de la conscription, la vue militaire certes incomplète mais bien ancrée des citoyens mâles (y compris de nos dirigeants actuels et à venir) va tendre à disparaître. On ne distinguera plus guère une « mitraillette » d’une mitrailleuse ni un maréchal-des-logis d’un colonel et, plus grave, les questions de défense seront absentes (si ce n’est déjà le cas) des débats d’une campagne électorale.
L’auteur présente son étude en deux parties, consacrées respectivement aux équipements, au sens large du terme, et à leur emploi. On aurait pu imaginer l’ordre inverse mais qu’importe ? En premier, la revue des armements, offensifs et défensifs, très complète, ne néglige ni les mortiers, ni les vedettes rapides, ni les drones et s’étend aux instruments de la logistique et même à la psychologie. Elle mentionne la notion de système d’armes et insiste sur la rapidité de l’évolution surtout en temps de guerre. Elle décrit les étapes de la vie d’un matériel, de la conception à la mise en service et à l’obsolescence, au fond toujours les mêmes mutatis mutandis qu’il s’agisse d’un pistolet automatique ou d’un porte-avions ! Elle prend soin d’avertir que de nombreux moyens ne sont à la portée que de grands États, dont la France (alors que « cent millions de Kalach » parsèment la planète), mais aussi que certains, comme les chars lourds ou les bombardiers géants, onéreux mais adaptés à un contexte donné (par exemple la guerre froide), voient leur intérêt diminuer avec la transformation de la conjoncture mondiale.
On note le même souci de ne rien oublier dans la seconde partie, par ailleurs plus hétérogène. Celle-ci expose les particularités du capital humain militaire : esprit de corps, mobilité, avancement, féminisation, etc. Et pourquoi pas nos amis les animaux, héritiers des oies du Capitole ! Elle trace également, non sans ambition, les grandes lignes des domaines stratégique et budgétaire, y compris dans le cadre des alliances.
On pourra toujours, en cours de lecture, se demander pourquoi la cartographie relève d’un usage « immodéré » ou si tous les officiers « assurent la direction au sommet de la hiérarchie ». Les vieux recruteurs avaleront mal l’affirmation, si souvent admise mais fausse selon laquelle « les exemptions de service national sont devenues de plus en plus fréquentes, surtout au profit des classes les plus aisées ». Ce ne sont que broutilles.
Clair, de lecture facile, ce « manuel » mérite une large diffusion afin d’éviter bien des préjugés et des clichés.